CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 5 mai 2023. Wagner/Swensen, Odyssée du Ring, Orch Nat Capitole, Libor, Elsner, Gastl, Swensen.
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Joseph Swensen construit une odyssée du Ring cosmique !
Durant le confinement Joseph Swensen après un grand découragement a construit une réduction de la Tétralogie de Wagner en pensant à Toulouse. Le travail conséquent que le violoniste, chef d’orchestre et compositeur a réalisé est considérable. Car les choix opérés dans les quatre œuvres qui forment cette tétralogie sont très convaincants. Respectant un temps pour chaque œuvre il assure des passages entre les moments choisis absolument géniaux. Même pour un connaisseur des leitmotivs l’enchaînement de certains d’entre eux peut se révéler savoureux et permet par le retour subit d’un thème de mieux supporter les indispensables coupures. C’est vraiment brillant.
Le choix de Swensen est de célébrer l’amour qui sauvera le monde. Ainsi les amoureux ont la part belle : toute la longue fin du duo d’amour de Siegmund et Sieglinde puis le duo d’amour de rencontre entre Siegfried et Brunehilde et leur séparation au début du crépuscule. Le monologue d’adieux plein d’amour de Wotan à sa fille est hélas coupé et seul l’appel de Logue subsiste.
Le Siegmund et le Siegfried de Christian Alsner ont toute la vaillance attendue et beaucoup de poésie dans la manière dont le ténor phrase. Il y a des nuances très délicates et de belles couleurs vocales chez ce ténor. C’est la soprano Christiane Libor qui restera comme un monstre d’endurance. Elle sera Siegliende et Brünnhilde trois fois. Dans la Walkyrie Swensen lui demande de chanter au moins sept fois le cri de la Walkyrie chantant son cri et ceux de ses sœurs en un enchaînement diabolique. Les aigus fusent ! Dans le duo de rencontre avec Siegfried elle irradie vocalement et son jeu de regards avec son partenaire est éloquent. Dans le Crépuscule elle passe du bonheur des adieux à la scène finale sans efforts. La résistance de cette cantatrice est extraordinaire elle termine sa prestation très engagée et horriblement exigeante sans paraître fatiguée. C’est tout à fait exceptionnel ! Rajoutons que la direction de Joseph Swensen est très spectaculaire. Il demande une énergie constamment renouvelée à l’orchestre et obtient une beauté et une urgence incroyable de chaque instrumentiste. C’est absolument grisant. Il garde pour la fin une manière absolument exquise de faire advenir le thème de l’amour qui sauve le monde comme dans un rêve. Cette fin est magique !
Joseph Swensen et l’orchestre du Capitole se connaissent depuis longtemps avec Mahler et Bruckner, ce temps wagnérien scelle un nouvel accord artistique au sommet.
Le public abasourdi, comme sonné, fait un triomphe à toute cette splendide équipe au service de la puissance du drame wagnérien. Seule une salle de concert et un orchestre symphonique de cette trempe peuvent offrir à la partition sensationnelle de Wagner sa dimension cosmique. Ce fut un moment fulgurant sans temps morts !
CRITIQUE. Concert. TOULOUSE. Halle-aux-Grains, le 5 mai 2023. Richard Wagner (1813-1883) / Joseph Swensen : Le Ring des Nibelungen ext. Avec : Christiane Liebor, soprano ; Christian Elsner, ténor ; Damian Gastl, basse ; Chœur du Capitole (chef de chœur Gabriel Bourgoin) ; Orchestre national du Capitole ; Direction : Joseph Swensen.