Présentée au Théâtre national de Toulouse, « Fin de l’histoire » est une création de Christophe Honoré autour d’un texte inachevé de Witold Gombrowicz.
Après le succès fracassant de son audacieux « Nouveau Roman », l’écrivain et cinéaste Christophe Honoré a débuté dans la mise en scène d’opéra avant de revenir vers le théâtre. Il raconte la genèse de sa nouvelle création, actuellement en tournée et présentée au Théâtre national de Toulouse : «L’état fragmentaire et incomplet du texte de Gombrowicz fut la raison première de la séduction de « l’Histoire » sur moi. Je cherchais après « Nouveau Roman », la matière d’un spectacle où je pourrais poursuivre un travail sur une forme impure, joyeuse et vivace. Je cherchais un texte à travailler par amputations et par ajouts, un texte qui m’entraîne vers une écriture de plateau où d’autres textes existants ou à écrire, pourraient venir s’agglomérer à une matrice initiale.»
Christophe Honoré poursuit: «À la lecture de « ’Histoire » inachevée de Witold Gombrowicz, j’ai immédiatement su que je tenais là à la fois mon point de départ et mon cadre de travail, le noeud de la fiction et la promesse d’un déploiement. Au théâtre, je ne peux oublier mon travail de cinéaste. Je ne peux oublier les efforts pour ne pas tant montrer des images qu’être capable de les faire dialoguer entres-elles. Je n’oublie pas la vieille distinction godardienne “fiction” versus “documentaire” : La fiction c’est la certitude, le documentaire c’est la réalité avec son incertitude. Et je me dis qu’au théâtre comme au cinéma, le travail du metteur en scène consiste à éclairer l’un avec l’autre. Entretenir le dialogue. Le dialogue entre la fiction d’une famille et le documentaire de l’Histoire. Entretenir le dialogue entre les mots et les images. Entre l’intime et le groupe.»
Dans « Fin de l’Histoire », Christophe Honoré a souhaité «faire dialoguer cette pièce inachevée, »l’Histoire », et l’ensemble de l’œuvre de Gombrowicz, notamment son journal et ses articles polémiques sur la littérature comme « Contre les poètes ». Mais je me propose d’ouvrir ce dialogue au philosophe et économiste Francis Fukuyama, connu pour ses thèses où l’achèvement de l’Histoire survient, le jour où un consensus universel sur la démocratie met un point final aux conflits idéologiques. On pourra penser que je cherche ainsi à apporter une fin à « l’Histoire » de Gombrowicz en évoquant le concept de fin de l’Histoire. Une lecture au pied de la lettre. Il me semble pourtant que j’interroge de cette manière la logique même du texte de Gombrowicz, je la relis depuis aujourd’hui. Gombrowicz a connu l’exil, il fut témoin des conséquences de la guerre sur ses proches. Son rapport à l’Histoire est nourri de ses expériences, de ses actes», prévient Christophe Honoré.
«J’appartiens à une génération protégée de l’Histoire, qui semble toujours se jouer ailleurs et dont je suis plus informé que témoin. En partant du texte de Gombrowicz, j’aimerais réussir à mettre en scène cette contradiction, cette énigme : que représente aujourd’hui l’expression avoir sa place dans l’Histoire ?», termine Christophe Honoré.
Jérôme Gac
« Fin de l’Histoire », du 11 au 17 décembre, du mardi au dimanche, au TNT,
1, rue Pierre-Baudis, Toulouse. Tél. : 05 34 45 05 05.
Rencontre avec Christophe Honoré, samedi 12 décembre, 14h00, à la Librairie Floury Frères,
36, rue de la Colombette, Toulouse. Tél. : 05 61 63 44 15.
–
photo: « Fin de l’Histoire » © Jean-Louis Fernandez