CRITIQUE. Opéra. TOULOUSE. THEATRE DU CAPITOLE, le 4 octobre 2024. GIUSEPPE VERDI. NABUCCO. S. PODA. G. MYSHKETA. Y. AUYANET. G. SAGRIPANTI.
Flamboyante ouverture de saison au Capitole
Nabucco créé à La Scala en 1842 est l’opéra qui a lancé la carrière de Verdi sur des sommets. Cet opéra, aimé du public pour son chœur des esclaves hébreux, est célébrissime mais il y a également dans le livret de Temistocle Solera tous les ingrédients d’un drame flamboyant comme Verdi les aimait. Amour, religion, politique, famille. Les quatre éléments sont intriqués savamment dans Nabucco.
La mise en scène met beaucoup de monde sur le plateau. En plus des nombreux choristes il y a des danseurs et parfois c’est confus devant l’encombrement de la scène. Des beaux costumes déterminent les peuples. Blancs pour les hébreux, rouge pour les assyriens et noirs pour les gens de pouvoir. La scénographie est lisible et les rapports entre les personnages sont efficaces. Je suis plus réservé sur les décors symboliques certes, mais lourds dans leurs manipulations. C’est Stefano Poda qui s’est occupé de tout : mise en scène, décors, costumes, lumières, chorégraphie. Côté musical la fête est complète. Dès l’ouverture Giacomo Sagripanti nous en offre une lecture énergique, contrastée et nuancée. Cette ouverture en forme de pot-pourri des grands thèmes de l’ouvrage trouve une belle cohérence dans cette interprétation bien construite.
Dès l’entrée du chœur l’ivresse des oreilles se poursuit. Belle homogénéité des pupitres, nuances subtiles et phrasés larges : le chœur d’entrée est splendide.
Les solistes ont été choisis avec soin dans un équilibre proche de la perfection. Jean-François Borras est un Ismaele de luxe. Voix splendide subtilement conduite et jeu sincère, il donne une belle envergure à son personnage. Sa bien-aimée la princesse assyrienne Fenena est incarnée par Irina Sherazadishvili. Voix corsée et longue d’une extraordinaire puissance dans les ensembles elle aussi, par un rang vocal supérieur donne beaucoup d’ampleur à son rôle. Zaccaria est incarné par Nicolas Courjal. Cet artiste est un très bon acteur, il a une voix très particulière. Une noirceur un peu métallique et une projection très incisive qui assoient son autorité mais il y a un manque de moelleux pour être une basse verdienne complète.
L’Abigaille de Yolanda Auyanet est admirable. Solidité des sauts de voix, tessiture homogène et legato superbe. Vocalises incisives ou chant élégiaque, elle excelle dans toutes les terribles exigences de la partition.
Le rôle-titre est tenu par Gezim Myshketa. Très en retrait dans ses premières scènes on ne l’entend pas dans les ensembles. Stress, voix endormie, économie ? Le mystère demeure car à partir de la deuxième partie la voix s’impose dans les ensembles et le timbre se réchauffe permettant à l’interprète de trouver des accents émouvants dans sa scène de folie et son repentir.
Cette belle distribution particulièrement homogène fait honneur à Verdi. L’orchestre aux couleurs subtiles et la direction dramatique du chef Giacomo Sagripanti offrent un parfait écrin aux chanteurs. Le chœur admirable également participe de la fête.
Cette co-production avec l’opéra de Lausanne a fait grand effet sur le public toulousain qui a applaudi généreusement.
Critique. Opéra. Toulouse. Théâtre du Capitole le 4 octobre. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Nabucco, opéra en quatre actes, livret de Temistocle Solera, créé le 9 mars 1842 à la Scala de Milan. Mise en scène, décors, lumières, costumes, chorégraphie : Stefano Poda ; Collaboration artistique : Paolo Giani ; Distribution : Nabucco, Gezim Myshketa ; Abigaille, Yolanda Auyanet ; Ismaele, Jean-François Borras ; Zaccaria, Nicolas Courjal ; Fenena, Irina Sherazadishvili ; Le grand prêtre, Blaise Malaba ; Anna, Cristina Giannelli ; Abdallo, Emmanuel Hasler. Chœur et orchestre du Capitole de Toulouse. Direction : Giacomo Sagripanti.
PHOTOS: Mirco Magliocca