Dans le cadre de la célébration à Toulouse du jeune Mozart, Les Clefs de Saint-Pierre présentaient un concert exceptionnel hors abonnement ce samedi 2 mars au Théâtre du Capitole. Cinq musiciennes et un musicien de l’Orchestre national du Capitole ont décidé d’explorer le répertoire de musique de chambre du jeune compositeur. Mais reconnaissons que la jeunesse de Mozart a en fait duré toute sa vie !
L’ensemble des musiciens – Photo Classictoulouse –
Ce concert hors saison des Clefs de Saint-Pierre s’intègre dans la série des programmes que l’Opéra et l’Orchestre national du Capitole consacrent cette année aux œuvres de jeunesse de Mozart. Dès 15 h, ce samedi 2 mars, le Théâtre du Capitole recevait six membres éminents de l’Orchestre national du Capitole. Aux quatre musiciens du Quatuor Cordes et Âmes : Laura Jaillet et Mary Randles, violons, Isabelle Mension, alto et Gaël Seydoux, violoncelle, sont venues se joindre la flûtiste Mélisande Daudet et l’altiste Joyce Blanco-Lewis.
Deux quatuors à cordes d’un adolescent de 16 ans ouvrent ce concert. De 1770 à 1773, Leopold Mozart fait découvrir l’Italie à son fils. Dès la fin 1772, Wolfgang est à Milan. C’est là qu’il compose son Quatuor n° 4 baptisé pour l’occasion « Milanais ». Les musiciens du Quatuor Cordes et Âme débutent leur participation avec cette œuvre écrite dans la tonalité lumineuse d’ut majeur. L’Andante central, comme une nostalgique cantilène, est précédé d’un Allegro souriant et suivi d’un Presto vif et joyeux. Les interprètes en soulignent le caractère délibérément optimiste.
Tout autre apparaît le Quatuor n° 13 en ré mineur, dit « Viennois », composé en 1773 dès le retour en Autriche du père et de son fils. Ses quatre mouvements alternent tensions et détentes dans une tonalité instable. L’inquiétude, parfois même le drame, sous-tendent l’Allegro ma molto moderato initial. Après la relative détente apportée par l’Andantino grazioso, le Menuetto renforce cette impression d’attente. Le mouvement ultime, Allegro moderato, s’avère encore plus étonnant. La fugue qui l’anime se transforme peu à peu en un étrange decrescendo final qui se fond dans un silence angoissant.
Le Quatuor avec flûte. De gauche à droite : Mélisande Daudet, Mary Randles, Isabelle Mension et Gaël Seydoux – Photo Classictoulouse –
La flûtiste Mélisande Daudet rejoint Mary Randles, Isabelle Mension et Gaël Seydoux pour interpréter le célèbre Quatuor n° 1 pour flûte et cordes en ré majeur, K. 285, l’un des trois quatuors composés par Mozart pour l’amateur Ferdinand De Jean. Les trois mouvements mettent en évidence la flûte d’une aisance virtuose de la soliste. Dominant de sa belle sonorité le tapis des cordes, elle donne l’impression d’un véritable concerto. L’Adagio se distingue en particulier par le chant nostalgique de la flûte soutenu par les touchants pizzicati des cordes. Un sentiment de délivrance joyeuse imprègne le Rondeau final.
Le Quintette pour cordes n° 1 en si bémol majeur, K. 174, composé à Salzbourg en 1773, constitue la grande surprise de ce programme. Ici encore, l’œuvre alterne les affects. L’Allegro moderato initial instille le doute et une certaine gravité. Le sommet expressif de la partition, l’Adagio, prolonge encore cette impression de rêve, délivrant un message plein d’émotion. L’atmosphère ne se détend que dans l’animation de l’Allegro final.
Très applaudis, les musiciens offrent généreusement, comme bis, une pièce particulièrement originale. Il s’agit d’une extrait de la « Serenata notturna » KV 239, de Mozart bien sûr, mais dans une transcription pour flûte et quintette à cordes signée de Christopher Waltham, présent ce soir-là, qui fut violoncelliste au sein de l’Orchestre national du Capitole et qui excelle dans ce genre d’exercice. Une belle initiative pour réunir tous les interprètes de cette belle rencontre musicale.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Les Clefs de Saint-Pierre • Opéra national du Capitole
