Chaque semaine, on vous invite à lire une nouveauté, un classique ou un livre injustement méconnu.
Troisième roman de Pierre Adrian après Des âmes simples (prix Roger Nimier 2017) et Les Bons Garçons, Que reviennent ceux qui sont loin – qui vient de sortir aux éditions Gallimard – voit son narrateur, un jeune homme, revenir après des années d’absence dans « la grande maison » en Bretagne, là où sa vaste famille a l’habitude de se retrouver au mois d’août. Avec l’âge sont venues aussi quelques pensées mélancoliques. Cette demeure familiale, que l’on croyait immortelle, aura pourtant une fin. Comme sa grand-mère, « petite dame fragile » redevenue petite fille, qui n’a plus toute sa tête.
Pierre Adrian © Francesca Mantovani / EditionsGallimard
Mais la chaleur de la tribu, rassurante et suffocante, chasse le spleen. Si les lumières d’automne s’annoncent déjà et que l’été va bientôt finir sous les tilleuls du jardin, le mois d’août fait le fier. Il y a des fêtes, le feu d’artifice du 15 août, les rites de la plage, des retrouvailles avec des jeunes filles qui, elles aussi, ont grandi… Puis, il faut occuper les enfants, comme Jean, le petit garçon de sa cousine, auquel il va apprendre la pêche aux crabes afin de le consoler d’une visite ajournée au supermarché du coin. De quoi garnir, une fois encore, la malle à souvenirs.
L’empreinte qu’on laisse
Que reviennent ceux qui sont loin commence comme un film de Pascal Thomas, mais les ciels et les lumières du Finistère sont aussi changeant que dans La Côte sauvage de Jean-René Huguenin. Une inquiétude monte. Pierre Adrian sème les indices. L’auteur de La piste Pasolini (prix des Deux Magots 2016) a le sens du tragique, pas du pathos. Son écriture, délicate et précise, met des mots justes sur l’indicible.
A la tristesse d’une maison de vacances qu’on referme s’ajoute ici la pire des peines. « On ne sait jamais l’empreinte qu’on laisse chez les autres. On aimerait qu’elle soit profonde », écrit Pierre Adrian. L’empreinte que laisse ce roman doucement déchirant et cependant lumineux ne s’effacera pas de sitôt.
Que reviennent ceux qui sont loin • Editions Gallimard
