A l’Extrême Cinéma qui commence ce mardi, Benjamin Leroy s’occupe de la sélection des courts-métrages alors qu’Eric Peretti vous introduit les longs. Voici les goûts des deux comparses qu’on est bien contents de revoir sur Toulouse !
Le film qui vous a causé votre premier choc cinématographique.
Eric : J’étais en dernière section à l’école maternelle, j’avais 5 ans, c’était Jason et les Argonautes de Don Chaffey, qui passait à la télé. Quand les squelettes sortent de terre à la fin, ça m’avait fait très peur, surtout que peu de temps après il y avait eu un petit tremblement de terre, et j’ai pensé que les squelettes allaient vraiment sortir de terre !
Benjamin : Alors moi, c’est moins classe. Ce n’est pas un choc mais c’est vraiment le premier film que j’ai dû regarder dix fois en un week-end quand mes parents l’avaient loué, c’est Quand faut y aller, faut y aller avec Bud Spencer et Terence Hill. Je me rappelle surtout la scène du début où il est en train de faire du roller sur la route, et il y a une nana qui le prend en stop, avec la musique je me suis dit « Il a trop la classe ! » Au début, c’était mon modèle et j’essayais de lui ressembler.
Le film que vous offrez le plus.
Eric : Pour les conseils, cela dépend vraiment de la personne et de ce qu’elle me demande.
Benjamin : Je n’offre pas de film ! Mais il y a encore un an, je bossais dans un vidéo-club, et je recommandais très souvent le film Morse à des gens qui n’étaient pas très branchés dans le cinéma fantastique, alors que moi j’aime beaucoup ce genre. A chaque fois, ils revenaient et disaient que c’était génial.
Le film que vous ne vous lassez pas de revoir.
Eric : Phantom of the Paradise de Brian de Palma.
Benjamin : The Blues Brothers, souvent je me mets une scène ou en entier.
Le film qui vous fait dire « il devrait être obligatoire au Bac ! ».
Eric : Je dirais un film comme La Commune de Peter Watkins qui pose beaucoup de questions sur les médias, les images, leur interprétation. Pour le bac, un film qui dure 5h40, il faut le mériter !
Benjamin : M le maudit qu’on a passé en séance scolaire une année aux hallus. Il y a le côté historique et en terme de réalisation et narration, ça avait je ne sais pas combien de dizaines d’années d’avance.
Le film qui vous fait dire « c’est mon histoire, ça ! »
Benjamin : Quand faut y aller, faut y aller. (rires) Pour Eric, ça doit être Shame, non ?
Eric : Mais comment tu sais ??? Et toi, c’est Poing de force, non ? (rires)
Le film dont vous avez repoussé le visionnage à cause d’un gros préjugé et qui vous fait dire « les préjugés, c’est tout pourri ».
Benjamin : Irréversible. J’appréhendais vraiment de le voir avec tout ce que j’avais lu, que ça allait être hyper éprouvant. Ce n’était vraiment pas ce à quoi je m’attendais, et la scène de viol je ne l’ai pas du tout trouvé éprouvante, mais longue et chiante. Ça fait un bail que je ne l’ai pas revu, peut-être que je le reverrais à la hausse maintenant.
Eric : Dans un autre genre, il y en a plein mais notamment Arrête-moi si tu peux que je n’avais pas envie de voir du tout parce que je déteste Tom Hanks. Il ne m’intéressait pas, je pensais que ça allait être super chiant et j’ai trouvé ce film fabuleux.
Le film dont vos amis disent « tu regardes ça, toi ? ».
Eric : Poing de force. Quand mes amis ont su que je m’intéressais à un documentaire sur le porno gay français, Mondo homo, ça a suscité beaucoup d’interrogations. « Mais tu es bien marié ? Ta femme est au courant ? »
Benjamin : ça dépend beaucoup de quels amis. Il y a ceux cinéphiles qui comprennent mais là j’avais acheté il n’y a pas longtemps The Damned United qui est l’adaptation d’un bouquin de David Peace sur le club de foot de Leeds dans les années 70. J’adore le foot, c’est plus par rapport à ça, si tu es cinéphile et que tu dis aimer le foot, ça ne se fait pas. Par rapport à mes amis plus normaux, ce sont tous les trucs un peu bizarres.
Le film que vous n’avez jamais rendu à son propriétaire… d’ailleurs, il peut toujours courir pour le récupérer.
Benjamin : Il y en a plein ! Il y en a un récemment que j’ai délibérément volé à mon père, c’est 12 hommes en colère, sachant que je n’allais pas le rendre. Je me suis dit qu’il serait mieux chez moi que chez lui.
Eric : Je rends tout, c’est plutôt moi qui prêtes.
Le film qui vous fait voyager et qui vous a décidé à aller dans les lieux décrits.
Benjamin : Ce sont tous les polars coréens à partir de J.S.A., cette nouvelle vague, Old boy et compagnie, qui m’ont donné envie d’aller en Corée. J’y suis allé et ce n’est pas tout à fait pareil que dans les films.
Eric : Je n’ai jamais vraiment voyagé par rapport à des films.
Le film qui vous enracine.
Benjamin : Je pense à Peur sur la ville, que j’aurais pu dire à la place de Quand faut y aller, faut y aller en premier souvenir (rires). Je m’en rappelle super bien la première fois que je l’ai vu, chez mes grands-parents, on était en famille. La musique, l’œil de verre… à chaque fois que je le revois, je pense à ça.
Eric : Je me souviens aussi d’un film que j’ai vu avec ma grand-père alors que mon grand-père était à l’hôpital. On était chez elle avec mon petit frère. C’était The Medusa Touch, La Grande Menace de Jack Gold. C’était assez effrayant, j’étais vraiment gamin, je devais avoir 8-9 ans. C’est un homme paralysé dans son lit qui peut par la pensée provoquer des événements catastrophiques. Le film m’avait assez marqué, je me rappelle toujours l’avoir vu avec ma grand-mère.
Peur sur la ville – generique par scupa
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Le film qui devrait être remboursé par la sécurité sociale.
Benjamin : The Blues Brothers, direct !
Eric : The Snapper de Stephen Frears qui met la pêche dès que je le vois.
Le film qui ne vous quitte pas.
Eric : Il y a Videodrome de Cronenberg qui reste dans ma tête.
Benjamin : Je ne sais pas, je passe.
Le film dont vous pouvez réciter des dialogues par cœur.
Eric : Plusieurs, Clerks par exemple.
« Tiens regarde, j’ai loué ça.
-Qu’est-ce que c’est ?
-Chicks with dicks ! Des nanas avec des bites plus grosses que la mienne.
-Et t’as loué ça !?
-J’aime m’instruire. »
Ou Eaux Sauvages « Je suppose qu’en faisant ce que vous avez fait, vous n’avez fait que précipiter la chose même qui vous a poussé à le faire. »
Benjamin : Ce serait Une nuit en enfer que j’avais adoré en salle. C’était une super séance. « Amis de l’aventure, l’aventure nous attend. » ou « Amis de la gnôle, la gnôle nous attend. » ou « Je suis peut-être une ordure, mais je ne suis pas un enfoiré. »
Le film qui est votre dernier coup de cœur.
Réponses de novembre 2014
Benjamin : It follows que j’ai vu au NIFFF, c’est une tuerie. Sinon, je ne connais pas très bien Depardon mais j’ai vu un de ses documentaires de 1983, Faits divers, qui est juste une tuerie. C’est la vie d’un commissariat et ce qui est génial, avec d’autres choses, c’est que l’on voit la France de 83. On voit comment était le Français moyen de cette période-là, où on pouvait dire des phrases que l’on ne pourrait plus aujourd’hui sans passer pour un raciste.
Eric : I Believe in Unicorns qui a fait l’ouverture du LUFF cette année. C’est un film américain d’une jeune réalisatrice, Leah Meyerhoff. Il est très poétique, très sensible, sur le passage à l’âge adulte de la jeune fille à la femme. C’est très très bien filmé, pas en numérique mais en Super 16 et certaines séquences en Super 8 avec un gros travail sur le son et la photographie. Vraiment, une grosse claque.
Benjamin : Moi je suis relou ! alors je vais t’en donner deux : mes deux coups de cœur du récent LUFF, à Lausanne. Il s’agit de Evolution, le nouveau film de Lucile Hadzihalilovic ; et d’une série de courts-métrages documentaires (titrés Streets of Fietas #1, 2 et 3) par Ben Jay Crossman, qui suivent le quotidien d’un quartier ultra pauvre (pas un township, la population y est mixte, noirs et blancs) de la banlieue de Johannesburg.
Eric : je voulais aussi dire Evolution qui est vraiment dans la continuité du travail de Lucile. Sinon, découverte LUFF également, les films expérimentaux de Peter Tscherkassky sont absolument remarquables. Sa déconstruction de la séquence cinématographique usuelle en maltraitant directement la pellicule avec une précision chirurgicale accentue les sentiments initiaux. À première vue on peut penser qu’il se contente de gratter la pellicule ou de la faire fondre. Mais à la fin de chacun de ses films, on se rend compte qu’ils racontent une histoire, en utilisant juste quelques images.
Au niveau long métrage, Forbidden Room de Guy Maddin m’a scotché un sourire béat durant ses deux heures de projection.