Chaque mercredi, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir un film américain passé inaperçu lors de sa sortie.
Cœur de tonnerre de Michael Apted
Michael Apted ne restera pas dans l’histoire du cinéma comme l’un des cinéastes les plus importants de son temps. Cet Anglais, né en 1941, fera ses armes à la télévision avant de se faire remarquer sur le grand écran avec Agatha (sur la disparition momentanée et restée mystérieuse d’Agatha Christie en 1926) où il dirige Dustin Hoffmann et Vanessa Redgrave. Hollywood l’appelle et lui confie Nashville Lady qui permet à Sissy Spacek d’empocher un Oscar ou Gorky Park, polar sur fond de guerre froide avec William Hurt, Lee Marvin et surtout Joanna Pacula, hélas tombée dans l’oubli. La carrière de Michael Apted est tracée : celle d’un faiseur, efficace et consciencieux, capable de diriger Sigourney Weaver dans le rôle de l’anthropologue Dianne Fossey avec Gorilles dans la brume ou Jodie Foster dans le mélodrame Nell. Dans le même registre de productions formatées, il réalisera Blink avec Madeleine Stowe, Mesure d’urgence avec Hugh Grant ou Plus jamais avec Jennifer Lopez. Récompense de cette carrière exemplaire : il est aux commandes en 1999 de la réalisation d’un épisode de la saga James Bond, Le Monde ne suffit pas, avec lequel il tire joliment son épingle du jeu.
Au-delà de ces produits de confection, il se dissimule dans la sage filmographie de Michael Apted un véritable petit bijou : Cœur de tonnerre. Ce film produit par Robert de Niro, inspiré d’un fait réel et réalisé en 1992 met en scène un inspecteur du FBI dépêché dans une réserve indienne du Dakota afin d’enquêter sur le meurtre d’un Sioux Oglala. Sur place, ce jeune homme, ayant refoulé ses vagues origines indiennes, va découvrir que ce crime, bien plus qu’un racisme anti-indien, masque des combinaisons complexes… Ce thriller efficace et nerveux, porté par un scénario implacable, a le mérite de ne pas épouser les codes du politiquement correct et si les Indiens – notamment incarnés par une militante et un vieux sorcier – ont plutôt le beau rôle, Cœur de tonnerre n’est pas un film à thèse et n’ethnicise jamais son propos. Il faut saluer une interprétation de grande classe avec un excellent Sam Shepard, Fred Ward ou de grandes figures amérindiennes comme Graham Greene (vu dans Danse avec les loups) et le chanteur John Trudell. Puis, il y a là dans le rôle principal Val Kilmer, l’un des acteurs les plus attachants de sa génération. Peu à l’aise dans les grosses productions (Batman Begins, Le Saint, The Doors, Alexandre), il s’est illustré dans des épatantes séries B (Kill Me Again, Salton Sea, Wonderland, Spartan, Profession profiler) ou le formidable Kiss Kiss Bang Bang. Enfin, il restera pour avoir été le lieutenant de Robert de Niro dans le magnifique Heat de Michael Mann. Cœur de tonnerre lui offre l’un de ses plus beaux rôles au gré d’un récit initiatique qui voit son personnage redécouvrir ses racines et comprendre un peu mieux le monde sans pitié qui l’entoure.