Les Wanderer et leurs amis magnifient SCHUMANN
Cette nuit Schumann devant le parvis de l’église de Lambesc a rassemblé un vaste public.
Le premier concert était donné par le Trio Wanderer seul. Robert Schumann a écrit trois Trio avec piano. Ils ont été donnés ce soir dans un ordre non chronologique. Le deuxième puis le troisième en enfin le premier. Ce qui frappe dans cet ordre et les choix de cette interprétation est avant tout la complexité d’écriture du deuxième et du troisième Trio et la séduction plus immédiate du premier. Avec une certaine austérité et beaucoup de concentration les Wanderer ont mis en valeur toute la modernité contenue dans le Trio en fa majeur. Les rythmes complexes, les accords quasi tristaniens et la multiplicité des formules sont d’une extraordinaire richesse. Les mélodies moins mises en valeur ne se déploient pas longuement, sauf dans les mouvements lents qui du coup en deviennent absolument sublimes. Dans les autres mouvements, les multiples idées musicales se suivent, parfois s’entrechoquent et l’écoute ne peut être véritablement sereine devant cette complexité révélée. Le troisième Trio en sol mineur est marqué par une grande douleur et l’idéal recherché par Schumann d’indépendance des trois instruments est portée à son comble.
La rigueur des Wanderer est impressionnante et un peu intimidante par le peu de contacts visuels affiché entre eux, toute cette recherche d’équilibre, de nuances et de couleurs dans des phrasés très précis se faisant comme par enchantement. A nouveau c’est la modernité et la complexité qui dominent lors de l’écoute du Trio. Plus lyrique le premier Trio en ré mineur a presque un coté séduisant et cela rend l’écoute plus facile. Tout cela est assez éloigné de la version beaucoup plus lisse et pourtant très aimée du Beaux Arts Trio. Les Wanderer eux ont pris le parti de la modernité et de la complexité révélée dans une importante concentration demandée au public.
La deuxième partie de soirée a eu une toute autre allure. La venue de l’altiste Christophe Gaugué a apporté beaucoup de vie et une présence chaleureuse. Le Quatuor avec piano Op.47 est une œuvre du bonheur. Robert et Clara Schumann sont enfin mariés et le piano de Clara jubile tout du long de ces deux compositions. La complicité des Wanderer seuls se passe presque de regards et cela est très impressionnant. Avec Christophe Gaugué partenaire habituel du Trio les choses sont tout à l’opposé. Il appuie son jeu sur le regard à ses partenaires et il ne cache pas son plaisir aux échanges réussis, il se tourne alternativement vers le partenaire avec lequel il cherche la fusion ou la complémentarité.
Le Quatuor passe comme un rêve de bonheur partagé. Le Quintette permet d’agrandir le cercle amical au violoniste Arthur Decaris. L’entente est tout aussi vive. Le Quintette, dans une construction parfaitement maîtrisée, court vers le final fugué. Les musiciens en véritable osmose semblent tout pouvoir avec leurs instruments. La musique sur une base collective si passionnée est à voir autant qu’à écouter. Les échanges visuels, les réponses en phrases qui se suivent ( violoncelle et alto), les accords subtilement équilibrés, tout a été un véritable régal. Et cette manière de se déchaîner dans le final tout en maîtrisant parfaitement des sonorités apolliniennes est du grand art. C’est le violoncelliste Raphaël Pidoux qui sera le plus démonstratif et le plus enthousiaste. Quel bonheur d’avoir pu participer à cette beauté totale et à cette jubilation en une belle soirée d’été, sur le Parvis de cette magnifique église en pierre de Rognes.
Toutes les photos sont de : Arthur Decaris-Christophe
Compte-rendu concert. Lambesc. Parvis de l’église Notre Dame de l’ascension, le 7 Août 2019. Robert Schumann (1810-1856) : Trio avec piano n° 2 en fa majeur Op.80 ; Trio avec piano n° 3 en sol mineur Op.110 ; Trio avec piano n° 1 en ré mineur Op.63 ; Quatuor en mi bémol majeur Op.47 ; Qunitette pour piano et cordes en mi bémol majeur Op.44 ; Christophe Gaugé, alto ; Arthur Decaris, violon ; Trio Wanderer : Jean-Marc Phillips-Varjabédian, violon ; Raphaël Pidoux, violoncelle ; Vincent Coq, piano ;