Un hymne somptueux au jazz latino-américain
A la limite de la biographie, ce petit bijou d’animation nous plonge dans les années 40/50, entre Cuba, New York, Paris, Barcelone, las Vegas, etc. Il nous met en présence de Chico, en fait l’immense pianiste Bebo Valdès, né en 1918, c’est d’ailleurs lui qui prête sa voix au personnage animé, un pianiste qui va céder aux sirènes musicales de l’Oncle Sam et apporter tout son talent à un genre en pleine émergence. Voire en pleine révolution. Au travers d’une bande son fascinante, ce film nous propose en transparence toute une histoire de la musique cubaine, mais aussi un panorama rapide de cette île tant d’un point de vue politique, qu’économique, culturel et social alors que la mainmise de Fidel Castro commence à la marquer de son étreinte. L’animation, en apparence loin des standards actuels qui font florès, est plus subtile qu’il n’y paraît, donnant par exemple des lignes et des couleurs particulières à chaque ville visitée. Si le trait est simple, c’est dans le mouvement que se cache sa valeur. En effet, des repérages sur de vrais musiciens ont permis de capter une fluidité et une authenticité qui rendent les concerts totalement présents. La romance très hollywoodienne avec Rita, la Belle chanteuse noire, nous vaut, avec ce personnage féminin, une scène d’anthologie au cours de laquelle, cette dernière, devenue une star mondiale, lance à la face d’un public de riches américains venus l’acclamer à Las Vegas, une violente diatribe antiraciste. En effet, autant elle était invitée à prix d’or à se produire dans le cabaret de ce somptueux hôtel, autant elle n’avait pas le droit d’y dormir ! Fait authentique. Les réalisateurs font ouvertement référence, quant à leur inspiration, au « Buena Vista Social Club » de Wim Wenders. Il y a pire !
Robert Pénavayre