« La philanthropie est un question financière, mais pas seulement »
Le MEDEF (Mouvement des Entreprises de France) est né en 1998, succédant ainsi au CNPF (Conseil National du Patronat Français). Cette organisation patronale représente les chefs d’entreprise français devant l’Etat et les Syndicats. Chaque département abrite une délégation du MEDEF. Maguelone Pontier est membre du Bureau du MEDEF 31 Coprésidente de la Commission Philanthropie, Directrice du Grand Marché MIN Toulouse Occitanie. Ajoutons que cette jeune dirigeante a déjà une visibilité personnelle de premier plan dans le domaine de la philanthropie. Rien d’étonnant à ce qu’elle soit notre interlocutrice lorsque nous avons voulu en savoir plus sur cette nouvelle activité du MEDEF 31 ayant donné naissance à une plateforme dédiée au mécénat.
Rencontre

Maguelone Pontier © Emmanuelle Choussy
Culture 31 : Le Medef de la Haute-Garonne vient de créer une plateforme dédiée au mécénat
Maguelone Pontier : Le Medef a entamé sa démarche philanthropique dès que Pierre-Olivier Nau en est devenu président, en 2020. C’est lui-même qui m’a demandé de prendre cette activité en charge. Nous avons immédiatement mis en place deux associations, que je préside par ailleurs : L’Ecole Tremplins du Sport (qui forme gratuitement une cinquantaine de personnes éloignées de l’emploi par an), hébergée au CFA de Blagnac, et La Maison du Sport au féminin, qui lutte contre les inégalités homme/femme dans le sport professionnel comme amateur. Dans ces associations se mêlent clubs, entreprises et collectivités afin d’être le plus efficace possible. Ces deux structures fonctionnent à 85% avec des fonds privés. Fort de la réussite de ces deux associations et de l’appétence de nombreux membres du Medef local, Pierre-Olivier Nau a poussé la réflexion un peu plus loin, surtout en constatant que 94% des entreprises occitanes n’ont aucune action philanthropique. Comme il était hors de question de rester les bras croisés devant ce pourcentage hallucinant, nous avons créé une commission philanthropie dans le but d’accompagner les entreprises non seulement en leur expliquant les avantages fiscaux du mécénat mais aussi, et surtout, leur faire comprendre que le mécénat ce n’est pas seulement donner de l’argent, en abordant le mécénat de compétence, la mise à disposition de locaux, de produits et bien d’autres moyens de soutenir une action philanthropique.
Vous-même, directrice du MIN de Toulouse, êtes engagée dans le mécénat
Tout à fait. Chez nous, tout le monde participe. Je suis loin d’être la seule au MIN, que ce soit en temps donné, en mise à disposition de produits, de locaux, de compétences, tout le personnel, à un moment ou un autre est impliqué dans un action de mécénat. C’est comme une sorte d’ADN insufflé par la Direction depuis 8 ans maintenant. 8% de nos locataires sont par ailleurs des associations. Cette plateforme s’inspire de ce que nous avons fait au MIN.
Alors, justement, quel est l’objectif exact de cette plateforme ?
Sa création résulte donc d’un constat. Les entreprises ne savent pas toutes comment faire et les associations ne savent pas comment et quoi demander. Souvent, ces dernières demandent de l’argent, et parfois c’est pour louer des bureaux, acheter du matériel, ou d’autres choses. Nous leur demandons d’expliciter leurs besoins exacts, qui peuvent parfois se résumer à un photographe pour une soirée, à des produits pour une loterie, une mise à disposition ponctuelle d’un véhicule de transport, etc. L’univers des besoins est sans fin, tout comme celui des possibilités de dons en fait. Notre plateforme a pour but de croiser tout cela. Notre expertise nous permet de gérer au mieux ces flux car nous avons la capacité de les mettre en miroir.
Comment allez-vous motiver les entreprises ?
Notre réseau de relations professionnelles nous donne accès à énormément de responsables. Il faut ensuite leur démontrer que la philanthropie est une question financière mais pas seulement. Après il faut savoir convaincre… Le tout est d’essayer de faire entrer dans les mœurs cette culture caritative qui marche tellement bien dans les pays anglo-saxons avec des résultats très satisfaisants.
Quelles associations sont éligibles à cette plateforme ?
Celles dont le siège est dans le 31. Peu importe que leur action déborde de notre département. Par contre nous ne donnons pas suite à toute demande d’association cultuelle ou politique. Tous les autres sujets sont ouverts. Le libre-arbitre du dirigeant est total. Sport, culture, sociétal, etc., le champ des possibles est immense.
Vous n’êtes pas dans le domaine du sponsoring
Effectivement, le sponsoring est avant tout une affaire de contrepartie. Le mécénat est tout autre chose. Vous avez raison d’aborder ce sujet car il y a souvent confusion. Dans le mécénat, la contrepartie doit impérativement être disproportionnée par rapport au don, c’est-à-dire largement inférieure en valeur. D’ailleurs il existe des règles très précises fiscalement sur ce thème, des règles que nous expliquons aux entreprises. La véritable contrepartie du mécénat c’est l’envie d’avoir un impact positif sur votre territoire. C’est notre premier argument pour inciter une personne à se lancer dans le caritatif. Bien sûr le système de défiscalisation a aussi un impact important sur la décision. Ceci dit, en réalité, beaucoup d’entreprises ne demandent pas cette défiscalisation. Je tiens à souligner que l’autre moteur de cette décision d’entrer dans le système est certainement d’embarquer, passez—moi l’expression, toutes vos équipes dans une action qui a du sens et qui améliorera votre marque employeur. Et quand vous parlez à votre personnel d’action environnementale, par exemple, ou encore de lutte contre le cancer, je peux vous dire que l’adhésion peut être réelle. J’aurais mille exemples à vous donner, mais je peux vous affirmer que ce système est particulièrement fédérateur au sein d’une entreprise.
Votre initiative est la bienvenue à un moment crucial qui voit les subventions publiques diminuer
Nous disons clairement que nous sommes aux côtés des collectivités et non que nous nous substituons à elles. Chacun doit prendre la part de ses responsabilités. Si j’ai un message à faire passer aux entreprises, c’est d’abord une question : avez-vous envie d’aider ? Si c’est le cas nous nous occupons de tout le reste ! Quant aux associations il faut qu’elles détaillent bien leurs besoins, simplement.
Pensez-vous faire école ?
C’est déjà fait ! Plusieurs départements ont adopté notre plateforme. D’autres devraient suivre bientôt. Nous sommes confiants !
Propos recueillis par Robert Pénavayre
> PLATEFORME PHILANTHROPIE DU MEDEF 31