En fanfare, un film d’Emmanuel Courcol
Le deuxième film du réalisateur Emmanuel Courcol : Un triomphe (2021) nous avait démontré combien ce cinéaste savait scruter au plus près la condition humaine. Son nouvel et troisième opus confirme la virtuose attention qu’il porte aux méandres de la société. Une comédie dramatique d’une bouleversante émotion.
Thibaut est un chef d’orchestre classique connu et adulé dans le monde entier. Au faîte de sa gloire, il est atteint d’une leucémie. Seule solution, une greffe. Encore faut-il trouver un donneur compatible. Stupeur, sa sœur ne l’est pas ! Après maintes analyses et recoupements, Thibaut découvre qu’il est un enfant adopté. Il apprend aussi qu’il a un frère. Parti à sa recherche, il le retrouve dans une petite ville du Nord de la France. Jimmy est employé dans une cantine scolaire et passe son temps de loisir à jouer du trombone. Les deux quadras font connaissance et comme Jimmy a le cœur sur la main, il lui fait don de sa moelle. L’opération est une réussite. Thibaut est en rémission. Pendant ce temps les deux frères se sont rapprochés. Jimmy joue dans une fanfare qui doit participer à un concours. Mais voilà que leur chef est muté loin de cette ville. Thibaut va convaincre Jimmy qu’il peut le remplacer. Il va même l’aider.
Emmanuel Courcol brosse ici le portrait de deux hommes façonnés par leur milieu mais tous deux passionnés de musique. Jimmy a l’oreille absolue. Personne ne lui a dit. Il lui prend l’envie de changer de vie. Evitant tous les poncifs que ce genre de rencontre peut présupposer, le réalisateur s’attache plutôt à briser les frontières entre deux répertoires : classique, celui des orchestres symphoniques, et populaire, plutôt rattaché aux fanfares.
Cette fiction est portée par deux comédiens hors pair. L’un est pensionnaire de la Comédie française. C’est Benjamin Lavernhe dont il est inutile de préciser combien son Thibaut semble diriger des orchestres depuis toujours. Ses regards, ses silences, ses moindres mouvements signent un interprète de grand talent. A ses côtés, un comédien qui ne va pas tarder à s’emparer de grands rôles de premier plan : Pierre Lottin. Cela fait un moment que l’on suit son ascension. Chacune de ses apparitions confirme une présence et un charisme incroyables. Véritable caméléon, il s’impose autant dans les Tuche que dans d’autres emplois singulièrement plus complexes. Celui de Jimmy en fait partie, tout en colère rentrée et avec une soif de réussite qui tout à coup va lui donner des ailes. Un duo majeur pour un film sur les liens fraternels finalement bouleversant…