Un petit air décalé, les cheveux en bataille, des lunettes de soleil cachant les cernes d’un jeune homme aux nuits blanches : c’est ainsi que je décrirais Malo au premier abord. Ne vous fiez surtout pas aux apparences, derrière cette tête dans les étoiles se cache un bosseur qui, de surcroît, est passionné. Rencontre avec un musicien, compositeur, chanteur, bref un artiste, un vrai.
J’ai rencontré Malo pour la première fois lors d’un événement avec des amis. Le personnage m’est apparu comme très surprenant : il s’entendait et s’accordait avec tout le monde. L’artiste montant, connu dans le milieu sous le nom de « La tête », avait cette faculté si singulière de se fondre partout : un boulanger, un rappeur, un Alsacien, un skateur ? N’ayez crainte, Malo aurait des atomes crochus avec eux. C’est réel. Bref, je m’égare. Il y a quelques mois, j’ai eu le bonheur de faire partie des premiers auditeurs d’un E.P. à venir, avec un accès en avant-première. Oui, ils sont comme ça, les jeunes créateurs : ils vous attrapent et vous forcent à écouter leur musique, par envie de partage et par amour du métier.
Oui, mais là, c’est différent.
I walk and some shits happen, ce n’est pas moi qui le dis, c’est le titre de l’EP. Sur fond d’instrumentales légères, la création de « La tête » se laisse dévorer, allez écouter par vous-mêmes. Le travail et la passion sont bien là. On y entend par-là des murmures, par ici des créations électroniques, sur fond d’instruments plus classiques : batterie, guitares. Le meilleur du neuf et de l’ancien. La particularité de Malo dans ses sons, c’est qu’il n’hésite pas à vous chatouiller les oreilles, avec un sens du détail saisissant. Les styles sont extrêmement variés : on navigue entre de l’amour, de l’aventure et une bonne dose de questionnement. Certains sons sont forts, d’autres naïfs.
Ma petite préférée, c’est Walk interlude, tout simplement la best-seller de l’EP. L’écoutant de nombreuses fois, en voiture, en train, dans le métro, en marchant dans les rues de Toulouse, je me suis aperçu de la force de cette création et de la superficielle profondeur du message : prenons le temps de vivre. Ce morceau en particulier résonne, d’une part parce que Malo y met de sa voix, avec quelques phrases très simples collant à la prod, mais aussi parce que cette création reflète un artiste complexe à l’histoire enracinée. Quand je l’écoute, j’imagine une balade au bord du canal du Midi, peut-être dans le Lauraguais. Je me vois aussi marcher au ralenti rue de Rivoli à Paris, au milieu des passants. Ce n’est pas qu’un album, c’est une évasion. C’est le genre de musique capable de me stopper en pleine rue pour lever la tête et prendre le temps d’admirer les hirondelles, comme quand j’étais petit.
Malo a grandi à Graulhet.
Graulhet, c’est une France que la France a laissée à l’abandon. Située dans le Tarn, la ville, autrefois tannerie de l’Occitanie, s’est retrouvée confrontée à la fin du plein emploi et aux fermetures en chaîne. La fin des temps ? Non. Les Graulhetois se sont relevés en se dirigeant majoritairement vers des activités culturelles. Preuve, s’il en faut : la commune a vu son nombre d’intermittents du spectacle grimper pour atteindre l’un des plus hauts taux d’Occitanie. C’est dans ce contexte qu’a grandi Malo, au milieu des saxophones, des pianos et des violoncelles, parce que ses parents sont des mélomanes hors pair. Pour être plus précis, le papa est disquaire, je ne vous fait pas un dessin. Voyez-vous, grandir dans une fratrie biberonnée à la musique, ça donne quelques prédispositions, en plus d’un goût prononcé pour la création artistique. Quand on lui en parle, Malo laisse paraître un petit rictus sur son visage, manière de dire une fois de plus, qu’il faut prendre ça avec légèreté, mais cette enfance sous forme de grande balade résonne dans le dernier EP de La tête.
Au final, je soupçonne fortement Malo de vouloir guider notre regard par la fenêtre pour prendre une pause. Peut-être souhaite-t-il même tous nous rendre comme lui : jeune, aimant et détaché de cette agitation sans fin ?