Il faut bien étayer encore le premier commentaire, passablement complet déjà, concernant une telle production.

Tristan et Isolde © Mirco Magliocca
Histoire d’affirmer avec une véhémence, bienveillante cependant : pas un seul élément de cette production n’est à discuter ! Tous les chanteurs crédibles, ça compte. Et quel Tristan ! Le plus radical et le plus héroïque. Doit-on là, consulter Nietzsche et affirmer : « Qu’est-ce qui rend héroïque ? – Aller en même temps au-devant de sa plus grande douleur et de son plus grand espoir. » Pour se transcender dans ce rôle impossible, Nikolai Schukoff n’a pas à s’occuper de l’émission de toutes les notes, c’est acquis. Il se concentre davantage sur le théâtre et nous livre mercredi 1er mars, un acte III d’anthologie, à en perdre une phrase qui se voit transformée en qualité : subjuguant.

Tristan et Isolde © Mirco Magliocca
Il ne pouvait qu’invoquer une Isolde comme Sophie Koch. Une Isolde mettant son organe à rude épreuve tout en chantant son texte avec une articulation inouïe, une gourmandise à chaque syllabe, avec un art du déplacement consommé, variant de l’acte I à l’acte III sans hystérie. Et autres commentaires déjà donnés dans le précédent compte-rendu. Une Isolde idéale, à n’en pas douter. Et qui est bien née sur la scène “capitoline“ !!
Sur Frank Beermann et son orchestre, fourni au maximum, là aussi tout a été dit, avec des solistes devenus de véritables concertistes, un chef soulevant ces ensembles de cordes tout en ménageant puissance et clarté dans ces assises d’autant plus impressionnantes dans les soulèvements vertigineux des crescendos. Un chef qui respire Wagner et qui fait respirer Wagner à son orchestre du moment. La complicité est flagrante.
Ces quelques lignes ne sont point là pour faire de la pub, car pour les deux représentations restantes, peu de chances de trouver encore une seule place correcte. Mais oui, Wagner fait le plein au Capitole avec un opéra de plus de cinq heures avec deux entractes.
Histoire de remettre en place certains commentaires : oui, en région, on est capable de faire du théâtre en opéra. Je ne ferai que rappeler un certain Wozzeck de Michel Fau et son Elektra, un Platée de folie, une Gioconda d’Olivier Py, un Rusalka incroyable, un Ariane et Barbe-Bleue de Poda, un Parsifal, un Tiefland, une Walkyrie. Et même une Traviata, reprise bientôt et affichant complet en quelques jours dès l’ouverture de saison en avril dernier. Une Traviata dans laquelle on se passera d’un ténor pelant un concombre dans la cuisine de sa dulcinée, mise en scène d’un illustre metteur en scène, et faisant l’admiration de Paris. Certaines soi-disant plumes parisiennes feraient bien d’aller un peu plus souvent en province, à leurs frais bien sûr, et aussi, un peu moins à l’étranger. Cela fait des années qu’à Toulouse, tout va très bien. Au fait, le nouvel Opéra national du Capitole affiche régulièrement complet. Et ailleurs ?
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