Rendez-vous à la Halle aux Grains ce mercredi 30 mars, à 20h pour un concert qui fera date, à n’en pas douter. Le Cycle Grands Interprètes vous invite à un événement ni plus ni moins puisque sur le plateau, c’est un orchestre inconnu à Toulouse, l’Orquestra de Cadaquès, fondé en 1988. Il sera dirigé par un chef fort apprécié des toulousains, Gianandrea Noseda, Directeur du Teatro Regio de Turin, et chef invité de cet orchestre catalan. Le concert débutera avec une pièce courte du compositeur espagnol, Fernando Sor. Il se terminera avec la Symphonie n°4 de Robert Schumann. Entre temps il y aura eu le Cinquième Concerto pour piano et orchestre en mi bémol majeur, opus 73, dit tout simplement “l’Empereur“, avec pour soliste Bertrand Chamayou, tout auréolé de son trophée des Victoires de la musique 2016. Mais, au fait, pourquoi Empereur ? Ni Beethoven, ni son éditeur n’auraient osé. Mais on soupçonne fort le pianiste et facteur de piano Johann Baptist Cramer. Après tout, quelle importance.
Programme
FERNANDO SOR [1778-1839]
Ouverture du ballet Hercule et Omphale
LUDWIG VAN BEETHOVEN [1770-1827]
Concerto n°5, en mi bémol majeur “L’Empereur”, opus 73
1 – Allegro 2 – Adagio un poco mosso 3 – Rondo (Allegro ma non troppo)
entracte ~ 20 mn
ROBERT SCHUMANN [1810-1856]
Symphonie n°4, en ré mineur, opus 120
1 – Introduction – Allegro 2 – Romance en la mineur 3 – Scherzo en ré mineur 4 – Finale en ré majeur
Robert Schumann a composé quatre symphonies, la Première en 1841, et très vite la Deuxième qui deviendra la Quatrième puisque remaniée environ dix ans plus tard. Ce qui fait que la Troisième dite “rhénane“ est bien la dernière du compositeur. Vous avez suivi j’espère. En 1841, à peine terminée, elle fut exécutée par Mendelssohn au Gewandhaus de Leipzig, sous le titre supprimé depuis de « Fantaisie symphonique ». C’est l’insuccès de cette première audition qui va inciter le compositeur à la réorchestrer complètement plus tard. La nouvelle version sera dirigée par Schumann lui-même au festival du Rhin à Düsseldorf.
Parmi les quatre, c’est peut-être la Quatrième en ré mineur qui est la plus connue et la plus aimée. C’est aussi la plus romantique, la plus fraîche et la plus originale de forme. Non seulement les quatre mouvements se succèdent sans solution apparente de continuité, mais ils sont reliés par leur matériau thématique. Sans se lancer dans une analyse verbeuse, par exemple, le thème principal de l’allegro resurgit, pour clore le cycle, dans le finale, enrichi, tout de même, d’éléments rythmiques nouveaux, d’un dynamisme puissant. On laissera les nombreux commentateurs qui ont cru bon discuter de l’orchestration schumannienne et de soi-disant « déficiences » oubliant qu’il existe des traits personnels d’expression orchestrale. Et tant pis, si ces traits là ne sont pas ceux d’un Beethoven, ou d’un Brahms.
Plus loin, quelques lignes sur le Concerto.
Gianandrea Noseda
Gianandrea Noseda est reconnu comme l’un des plus grands chefs de sa génération. Il a été nommé « Musical America’s 2015 Conductor of the Year ». Sa nomination comme Directeur Musical du Filarmonica Teatro Regio de Turin en 2007 a été le début d’un grand développement pour l’orchestre avec des productions et des tournées internationales, des enregistrements et des projets de films. Ses initiatives ont propulsé le Teatro Regio de Turin sur la scène mondiale, où il est devenu l’un des fleurons culturels les plus importants d’Italie. Sous la direction de Gianandrea Noseda, il a donné des concerts en Autriche, en Chine, France, Allemagne, Japon et Russie. En août 2014, le chef a accompagné le Teatro Regio de Turin au Festival d’Edimbourg pour ses débuts au Royaume-Uni. Ils ont effectué ensemble des tournées en Amérique du Nord.
Gianandrea Noseda est également chef invité de l’Orchestre Philharmonique d’Israël, du Pittsburgh Symphony Orchestra, chef principal de l’Orquestra de Cadaqués et Directeur Artistique du Festival de Stresa (Italie). Il a dirigé le BBC Philharmonic de 2002 à 2011. En 1997, il est le premier étranger à être nommé chef principal Invité du Théâtre Mariinsky, un poste qu’il occupera pendant une décennie. Depuis 2002, il a une relation privilégiée avec le Metropolitan Opera avec qui il a dirigé de nombreuses productions dont en 2013-2014 l’opéra de Borodin Prince Igor en collaboration avec le metteur en scène Dmitri Tcherniakov.
En 2015, il fait ses débuts avec le Philharmonique de Berlin et au Festival de Salzbourg, ainsi qu’avec le Philharmonique d’Israël, le Philadelphia Orchestra et l’Orchestra dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia. Avec le Filarmonica Teatro Regio de Turin, il fait ses débuts au Festival de Pâques à Aix-en Provence. Son engagement envers les jeunes musiciens se poursuit avec une tournée européenne de l’European Union Youth Orchestra avec Diana Damrau en août 2015, avec notamment une date au Festival d’Edimbourg.
On se souvient d’une captivante Première Symphonie de Brahms que ce chef a dirigé la saison dernière ici même avec l’Orchestre du Capitole de Toulouse. L’accueil fut triomphal.
Bertrand Chamayou
Bertrand Chamayou fait partie des artistes désormais incontournables de la scène musicale. Doté d’un très vaste répertoire, impliqué dans la création contemporaine et oscillant d’un style à l’autre avec une facilité déconcertante, il impose aujourd’hui une assurance et une imagination saisissantes, ainsi qu’une remarquable cohérence dans son propos artistique.
Lors des saisons à venir, il se produira dans les plus grandes salles du monde entier, son statut le classant maintenant parmi les plus grands pianistes, les plus recherchés par les festivals les plus prestigieux comme par les chefs, les orchestres.
La musique contemporaine occupe une part importante de son activité et il a travaillé avec des légendes vivantes de la création comme Henri Dutilleux ou György Kurtag. Il a été invité dans le cadre du festival « Présences » à donner les concertos de Thomas Adès et de Esa-Pekka Salonen. Son activité de chambriste est de même essentielle, et il se produit régulièrement avec ses amis Sol Gabetta, Renaud Capuçon, ……
Natif de Toulouse, Bertrand Chamayou a été remarqué dès l’âge de 13 ans par le pianiste Jean-François Heisser dont il a suivi par la suite l’enseignement au Conservatoire de Paris. Dans le même temps, il a travaillé assidûment aux côtés de l’illustre Maria Curcio à Londres, et a reçu les conseils éclairés d’un grand nombre de maîtres, dont ceux de Murray Perahia.
Bertrand Chamayou a par ailleurs à son actif des réalisations ambitieuses comme le cycle des Vingt regards sur l’Enfant-Jésus à l’occasion du centenaire du compositeur Olivier Messiaen ou les Douze études d’exécution transcendante de Liszt, données maintes fois en concert, et dont résulte un « live » salué unanimement par la critique (Sony Classical). Il a signé en 2008 un récital Mendelssohn (Naïve) couronné de très nombreuses récompenses. Au printemps 2010, Bertrand Chamayou a présenté un disque César Franck (Naïve) accompagné par le Royal Scottish National Orchestra dirigé par Stéphane Denève. Ce disque a reçu plusieurs récompenses dont l’Editor’s Choice de Gramophone. Un album Ravel tout “chaud“ vient de paraître.
On ne peut oublier que notre toulousain vient d’obtenir les Victoires de la musique 2016 dans la catégorie Artiste instrumental, ici même à la Halle aux Grains le 24 février.
Sur le Concerto pour piano et orchestre n°5 en mi bémol majeur, op.73, « L’empereur »
Nous voilà en décembre de l’an 1808. Beethoven reçoit de Jérôme Bonaparte, alors roi de Westphalie, la proposition d’être son Kapellmeister. Il est tout prêt d’accepter ce haut poste. Le 22 décembre, il donne à Vienne un concert de ses œuvres où sont notamment crées, les Cinquième et Sixième Symphonies et le Quatrième Concerto pour piano et orchestre qu’il joue lui-même. Le succès incontestable de la soirée lui vaudra le soutien de plusieurs mécènes qui sont bien décidés à le garder à Vienne. C’est ainsi que les princes Kinsky et Lobkowitz, et l’archiduc Rodolphe signent le 22 mars 1809, un décret lui accordant une pension annuelle confortable. En retour, il devra demeurer à Vienne et donner des leçons à l’archiduc. Sa sécurité matérielle est donc assurée et sa dignité satisfaite. Le compositeur reste à Vienne.
Il se met au travail et commence le premier mouvement de son Cinquième Concerto pour piano tandis que Vienne et l’Autriche préparent la guerre contre Napoléon Ier. C’est ainsi que l’on retrouvera sur le manuscrit de la partition, en marge des esquisses : « Chant de triomphe pour le combat…Attaque ! Victoire ! » Mais l’inspiration triomphale est bientôt défavorablement troublée par les revers subis par l’armée autrichienne. Puis, le siège de Vienne sur plus de six mois va fortement perturber la composition. Il faudra attendre six autres mois, et la paix de Vienne, pour que Beethoven se remette au travail et puisse achever son ultime concerto pour piano. Entre temps, l’archiduc Rodolphe est mort. Telles furent, résumées, les conditions de création de ce chef-d’œuvre. Coup sur coup, Beethoven aura achevé son Quatuor n°10, ce Concerto pour piano n°5 et la Sonate l’Adieu, toutes partitions écrites en mi bémol majeur.
Œuvre de grande ampleur, ce Cinquième Concerto s’apparente à une symphonie avec participation du piano. Son caractère majestueux et solennel d’un bout à l’autre sera un élément supplémentaire au qualificatif qu’on lui attribue de “Empereur“ peu après la mort de son compositeur. Puissance et éclat recherchés sont bien présents, réalisés magistralement. Il est dédié à l’archiduc Rodolphe, et fut créé à Leipzig, le 28 novembre 1811 ? – lors du septième concert du Gewandhaus. Le soliste était Friedrich Schneider et l’orchestre dirigé par P. C. Schulz. La « première » à Vienne eut lieu le 12 février 1812, Karl Czerny, élève de Beethoven, était le soliste. Czerny qui, au départ, avait refusé de le jouer les délais étant trop courts pour lui. Tous les apprentis pianistes connaissent les Etudes de Czerny et ont bien transpiré dessus.
A Paris, ce fut le 12 mars 1837, donc, bien plus tard. C’est Franz Liszt qui le joue. Berlioz est dans la salle, et en fera le compte-rendu. Il écrit, entre autres : « …les longues périodes pompeuses du premier morceau, ces mélodies souriantes que le piano mêle aux soupirs des hautbois et des flûtes, ce chant religieux des violons dans l’adagio, ces dialogues si originaux pendant lesquels le piano paraît tantôt menacer l’orchestre, tantôt le flatter, lui obéir, s’effacer et ramper en esclave devant lui, ces mots aigus tombant lentement du clavier en octaves, comme des perles dans un vase d’or, pendant que les instruments à vent, conversant mystérieusement ensemble, semblent se confier l’un à l’autre de tendres secrets (…), tout cela a tenu, pendant trois quarts d’heure, la salle dans une véritable extase.… ».
Orquestra de Cadaqués
L’Orquestra de Cadaqués a été fondé en 1988 à l’initiative de jeunes musiciens espagnols et européens qui souhaitaient former un orchestre classique avec des objectifs forts : travailler en étroite collaboration avec des compositeurs contemporains, la redécouverte de l’héritage musical catalan et promouvoir la carrière des solistes, compositeurs et chefs d’orchestre prometteurs.
Avec des racines méditerranéennes, mais possédant une orientation nettement cosmopolite, l’Orquestra de Cadaqués a reçu une reconnaissance immédiate sur la scène musicale pour la qualité et l’engagement de ses musiciens et pour le dynamisme de ses projets.
Des chefs d’orchestre tels que Sir Neville Marriner, Gennady Rozhdestvensky et Philippe Entremont ont soutenu l’Orchestre et sont devenus les principaux musiciens invités, tout comme Alicia de Larrocha, Teresa Berganza, Paco de Lucía et Victòria de Los Angeles, entre autres.
En 1992, l’une des plus importantes initiative de l’orchestre a été lancée : le Concours International de Direction, un événement qui a ouvert les portes de la profession à de jeunes chefs d’orchestre du monde entier. Pablo González, Gianandrea Noseda, Vasily Petrenko ou Michal Nesterowicz ont été parmi les gagnants de ce concours, ils occupent aujourd’hui des postes de chefs d’orchestres renommés. Gianandrea Noseda, lauréat du Concours 1994, a été nommé chef principal de l’Orquestra de Cadaqués en 1998. Jaime Martín l’un des membres fondateurs de l’orchestre et flûtiste depuis plus de vingt ans, a été nommé chef d’orchestre titulaire en 2011.
Pour promouvoir et diffuser la musique contemporaine, l’Orquestra de Cadaqués a créé une résidence pour les compositeurs. Depuis 20 ans, l’Ensemble a créé de nombreuses œuvres de compositeurs espagnols tels que Xavier Montsalvatge, Jesús Rueda, Hector Parra, Jesús Torres, Luis de Pablo et Joan Guinjoan. L’orchestre est également impliqué dans des projets éducatifs et travaille en collaboration avec divers orchestres de jeunes en Espagne.
Michel Grialou
Les Grands Interprètes
Orquestra de Cadaqués – Gianandrea Noseda (direction)
Bertrand Chamayou (piano)
mercredi 30 mars 2016 à la Halle aux Grains
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Mécénat / Partenariats
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