L’homme qui ne voulait pas être roi
Formidable ! Nommé sept fois aux Golden Globes 2011, le dernier opus de Tom Hooper est un monument. Entendons-nous bien, il ne s’agit en aucun cas d’un blockbuster à effets spéciaux. Non, il s’agit tout simplement d’une fantastique leçon d’Histoire doublée d’un portrait étonnamment attachant d’un homme qui était roi malgré lui et régnait sur des centaines de millions de sujets de par le monde. Nous sommes à la veille du dernier conflit mondial. Edouard VII abdique avant d’être couronné car son mariage avec Wallis Simpson lui est refusé par l’Eglise anglicane. Son cadet, George, se retrouve, à son grand désarroi, sur le trône d’Angleterre. A son grand désarroi, pourquoi ? Il est incapable de faire le moindre discours car il est bègue. La médecine traditionnelle ne lui ayant rien apporté comme solution, sa femme décide de consulter en secret Lionel Logue, un thérapeute australien installé à Londres, sans aucun diplôme officiel. Plus psychiatre qu’orthophoniste, Lionel comprend rapidement les raisons de ce bégaiement et veut remonter à ses sources. Mais on ne manipule pas le roi d’Angleterre comme ça. Lionel va tout de même s’arcbouter sur sa méthode, bientôt enfin reconnue par son royal patient. Il est temps car Hitler vient d’envahir la Pologne et George VI doit annoncer à ces sujets, par voie radiophonique dans le monde entier, que l’Angleterre rentre en guerre contre l’Allemagne. Pour le coup, il ne s’agit plus de bégayer. La scène, magistrale, est formidablement émouvante. Cette lutte acharnée contre un pareil handicap trouve avec Colin Firth un interprète hors pair. Travaillant davantage le blocage psychique que le handicap physique, il trace un portrait de George VI d’une sidérante justesse de ton. Geoffrey Rush est ce Lionel pugnace jusqu’au-delà des limites admises par le protocole. S’appuyant sur les carnets intimes de ce thérapeute, il nous fait revivre ces moments intimes qui ont aussi façonnés le monde.
Robert Pénavayre