Rendez-vous au CGR Blagnac, le dimanche 13 octobre 2019 à 18h pour sortir les mouchoirs. C’est presque systématique. Giacomo Puccini, le compositeur de cet opéra voulait des larmes, et des larmes avec Madame Butterfly, une production enregistrée au Festival de Glyndebourne en juin 2018.
« Les passions, qu’elles soient ou non violentes, ne doivent jamais être exprimées de façon à susciter de l’aversion, et, tout comme la musique, dans les situations les plus terribles, ne doivent jamais offenser l’oreille mais au contraire plaire à l’auditeur, ou, en d’autres termes, ne doivent jamais cesser d’être de la musique… » G. Puccini
C’est une entrée au répertoire pour le Festival en saison d’été. L’action est transposée à l’aube des années 1950 avec des militaires américains qui se comportent en terrain conquis dans un Japon défait. Le cas de Cio-Cio-San n’est pas isolé et elles sont nombreuses, ces très très jeunes geishas, à être manipulées par des individus du genre Goro. Il y a toute une dimension sordide, mise en évidence par la mise en scène, sur le trafic mis au point par le régulateur des mariages, ou plutôt l’entremetteur dont le commerce semble florissant. Dans ses bureaux, on peut d’ailleurs consulter une sorte de pressbook des disponibilités du moment. Cela va même jusqu’à des petits films. Le fierot arrivera à ses fins. Sa conquête sera même mère, ce qui ne l’empêchera pas de retourner dans son pays, d’oublier son contrat signé, et d’épouser une américaine que l’on apercevra en toute fin d’opéra.
Pour les deux actes suivants on passe à un autre décor. On se retrouve dans une maison japonaise classique avec, pour commodité, des panneaux coulissants, mais meublée à l’américaine. Vous aurez ainsi droit au chœur muet qui sort, par une idée de mise en scène fort belle, d’un électrophone sur lequel tourne un vinyle posé par Butterfly. Tout semble mettre en évidence l’idolâtrie que l’héroïne semble éprouver pour son époux américain. D’ailleurs, la tenue de geisha n’est pas au rendez-vous remplacée par un tailleur moulant mode année 50 et les fameux talons hauts. Autre élément de décor, un jardin finement stylisé et magnifiquement éclairé. Elle retrouvera le kimono, blanc, renouant avec ses racines, avant de mettre fin à ses jours.
La distribution vocale dans ses principaux rôles, n’appelant que des louanges, est la suivante :
Cio-Cio-San, l’héroïne sera interprétée par la soprano moldave Olga Busuioc au timbre splendide
Pinkerton, le lieutenant goujat, le ténor sonore Joshua Guerrero
Susuki, la gouvernante de Cio-Cio-San, la formidable mezzo Elizabeth DeShong
Sharpless, le Consul des USA à Nagasaki, le baryton Michael Sumuel
Goro, le responsable des mariages, l’excellent ténor Carlo Bosi
Prince Yamadori, un prétendant, le baryton Simon Mechlinski
Les musiciens sont ceux du London Philharmonic Orchestra.
Les chœurs sont les membres du Glyndebourne Chorus.
La direction musicale est confiée au chef israélien Omer Meir Wellber, constamment inspiré, dirigeant sans excès de pathos, se contentant avec réussite de mettre en valeur toute la force bouleversante de la partition. Puccini a bien composé les lignes qu’il fallait pour conduire à son but : « Des larmes, des larmes… »
La mise en scène de cette production est de Annilese Miskimonn, metteuse en scène britannique habituée des lieux
Dans le style obstiné à fendre le cœur de celui qui l’écoute, le natif de Lucques, Giacomo Puccini, est bien le maître incontesté. Le livret de cet opéra, finalement le plus, statique, intimiste de son compositeur, et centré sur un seul personnage, ne pourra que vous arracher des larmes, grâce aussi à une musique opulente aux raffinements extrêmes. Ecrite en 1904, c’est une véritable tragédie japonaise en trois actes. « Et faire pleurer, toujours, mais avec quelque chose de merveilleux, séduisant et gracieux » !!! vous confierait le compositeur.
1904, tandis que s’inaugure l’ère Meiji, laquelle voit la modernisation foudroyante de l’Empire du soleil Levant, donc, son occidentalisation, l’Occident, lui, s’entiche de “japoniaiseries“. Au moment donc, où Puccini écrit son opéra, les japonais, eux, ont bien mieux assimilé les leçons venues de l’Ouest. L’empereur dîne d’un rosbeef, l’impératrice apparaît en public les sourcils non rasés et les dents non noircies. Le port du sabre est interdit aux samouraïs, sortir les pieds nus est proscrit,…
Enfin, février 1904, alors que se tient la première de Madame Butterfly à la Scala de Milan, les compatriotes de Cio-Cio-San, héroïne naïve et pure, torpillent sans avertissement la flotte russe d’Extrême-Orient.
Photos Madame Butterfly © Glyndebourne Productions Ltd. / Robbie Jack
Cinéma CGR Blagnac
Madame Butterfly • Giacomo Puccini
dimanche 13 octobre 2019 à 18h