Nouveau festival de jazz
1ère édition du festival Toulouse en Jazz
du 22 au 24 mars 2018
Toulouse fut longtemps une place forte du jazz grâce aux nombreux clubs que l’on y recensait il y a encore un quart de siècle. Le paysage jazzy s’étant singulièrement appauvri depuis la fermeture du Mandala et l’arrêt récent des concerts au Rest’ô Jazz, derniers bastions de la ville rose, les jazzfans toulousains se retrouvent désormais quasi orphelins. Un comble dans la cité de Claude Nougaro, pépinière de cracks de la musique afro-américaine ! La naissance du festival Toulouse en Jazz aux premiers jours du printemps est donc une heureuse nouvelle pour les amoureux du swing, ce jazz débarqué en France il y a cent ans en même temps que les soldats américains à la fin de la Première Guerre mondiale.
Entretien et présentation du festival avec Olivier Boulliat, fondateur et président de Toulouse en Jazz.
Daniel Sidney Bechet Quintet
Vous lancez la 1ère édition de Toulouse en Jazz les 22, 23 et 24 mars. Pourquoi créer un nouvel événement alors que vous organisez déjà la saison de Jazz au Mercure ?
Les événements de jazz et les lieux où l’on peut écouter cette musique se sont réduits comme peau de chagrin à Toulouse ces vingt dernières années. Aujourd’hui, la manifestation phare est Jazz sur son 31 à l’automne et c’est le quasi désert le reste de l’année. Nous avons créé Jazz au Mercure en 2005 à l’hôtel Mercure Toulouse Centre, une saison de concerts qui nous permet d’accueillir des artistes locaux, régionaux, nationaux voire internationaux, avec toutefois la contrainte d’un budget limité. En 2008, lorsque le Casino Barrière a ouvert, j’ai lancé une seconde manifestation qui s’appelait Les Grands crus du Jazz. L’ambition était autre : faire venir dans une salle prestigieuse les stars mondiales du jazz que nous ne pouvions pas nous permettre de programmer à Jazz au Mercure. Nous y avons produit 16 grands concerts mais c’était devenu trop lourd à gérer ; il y avait trop de risques financiers pour une petite association comme la nôtre. Nous n’avons donc pas prolongé l’expérience pour mieux concentrer nos efforts sur la saison de Jazz au Mercure. Après un gros événement en novembre 2015 pour fêter les 10 ans de sa création et alors que s’annonçait le 300ème concert, nous voulions organiser de nouveau une manifestation marquante. Nous avons réfléchi à une autre formule et les planètes se sont alignées pour la réaliser au Sing Sing. C’est une nouvelle salle, de taille assez modeste, mais ses 300 places correspondent parfaitement à nos capacités. Elle est accueillante grâce à son bar et une ambiance différente de celle de l’hôtel Mercure. C’est donc tout un enchaînement de circonstances favorables qui a concouru au lancement de l’édition inaugurale de Toulouse en Jazz. Jazz sur son 31 ayant lieu en automne, le début du printemps nous a semblé une période opportune par rapport à l’été, saison où de nombreux festivals se déroulent un peu partout dans la région.
Sachant que ce nouveau festival Toulouse en Jazz ne remet pas en cause l’existence de Jazz au Mercure. Il s’agit bien d’un événement… en plus.
C’est bien ça. À Jazz au Mercure, nous invitons dans une petite salle et avec un budget limité des artistes qui ont l’habitude des clubs. Nous ne pouvons pas faire venir des stars, ce qui nous coûterait trop cher. Quand nous organisions nos concerts au Casino Barrière, nous ne pouvions pas faire venir les mêmes artistes qu’à Jazz au Mercure, ceux-ci n’ayant pas assez de notoriété pour remplir une salle de cette taille. Nous avions donc présenté des stars mondiales comme Monty Alexander, Jacky Terrasson, le Golden Gate Quartet, Didier Lockwood (qui nous a quittés récemment), etc. Toulouse en Jazz, c’est un petit peu entre les deux…
Justement, quel esprit, quelle ligne directrice avez-vous voulu donner à la programmation de Toulouse en Jazz ?
L’objectif est évidemment de faire quelque chose de différent de Jazz au Mercure. À quoi bon faire entendre au Sing Sing les mêmes choses qu’au Mercure ? Ça n’aurait aucun intérêt du point de vue artistique. La question a donc été : « Que pouvons-nous faire de différent qui soit attractif pour le public ? ». Nous avons rapidement retenu le principe de proposer une grande soirée musicale en deux parties. Une première avec un duo de pianos blues boogie de musiciens de renommée internationale qui vont dialoguer entre eux, se répondre avec leurs instruments. Là encore, en ayant en tête que notre budget est limité puisqu’il ne provient que de la billetterie et du mécénat culturel. Nous ne bénéficions d’aucune subvention publique. Partant de là, nous avons donc imaginé la formule suivante : inviter non pas six pianistes pour les duos des trois soirs mais trois qui tourneront entre eux de manière à n’avoir jamais la même paire.
Qui sont ces trois pianistes ?
Je vais citer en premier le régional de l’étape, Philippe Lejeune, musicien originaire de Toulouse qui fait depuis longtemps une carrière internationale, notamment aux États-Unis où il effectue deux grosses tournées par an et où il a joué dans de nombreux grands festivals. Il est directeur artistique du festival et tous les habitués de Jazz au Mercure le connaissent bien pour l’y avoir entendu à de nombreuses reprises depuis 2005. Nous l’avons associé à deux pianistes étrangers, internationalement connus comme lui : le Catalan Lluis Coloma, également déjà programmé à Jazz au Mercure mais jamais en duo de pianos, et le Belge Renaud Patigny qui lui aussi fait une très belle carrière aux États-Unis et en Europe. Ces trois pianistes ont une solide expérience de la scène internationale, une grosse discographie, et sont rodés dans l’exercice du duo de pianos en public.
La première partie de soirée étant dédiée au piano blues boogie, à quoi est consacrée la seconde ?
À tout autre chose… Nous avons invité un bel orchestre chaque soir, ce qui nous est impossible à Jazz au Mercure pour des raisons budgétaires. Jeudi 22 mars, nous faisons venir le quintet de Daniel Sidney Bechet pour un hommage à son illustre père. Il est le batteur de cette formation qu’il a montée avec les meilleurs musiciens français du style Sidney Bechet. Il tourne avec eux un peu partout en Europe. Vendredi 23, nous avons programmé Philippe Duchemin, un pianiste qu’on connaît bien et qui va se produire cette fois-ci avec la chanteuse américaine Leslie Lewis, elle-même en tournée européenne en mars. Très belle interprète qu’on va découvrir ce soir-là puisque c’est une première pour elle à Toulouse. Philippe Duchemin est un des plus grands pianistes swing que nous ayons en France, dans la lignée d’un Monty Alexander. Comme les précédents, il fait une belle carrière internationale. Le troisième soir, samedi 24, nous accueillons le chanteur et harmoniciste Nico Wayne Toussaint et son quintet. Nico est déjà venu à Jazz au Mercure mais il a encore pris une dimension supplémentaire depuis sa dernière prestation chez nous. Pour la première fois en août dernier, il a été programmé sous le grand chapiteau de Marciac avec ce nouvel orchestre qu’il va donc présenter à Toulouse. Un autre musicien qui a une énorme carrière derrière lui, avec tous les grands festivals américains à son palmarès.
Il y a donc des styles très différents dans la programmation de ce festival.
C’est notre volonté. Au départ, nous avions envisagé de faire un festival à thème uniquement dédié au piano blues boogie. Nous nous sommes alors demandé si les gens allaient venir trois soirs de suite écouter la même chose… Peu probable et trop réducteur. De là est venue l’idée de faire une première partie de piano blues boogie suivie d’une seconde avec un bel orchestre. Voilà comment en trois jours, nous allons pouvoir proposer une grande palette de styles musicaux.
Un choix qui m’amène à vous poser la question suivante : ce festival s’adresse-t-il plutôt à des initiés ou a des gens qui ont envie de découvrir le jazz ?
Par principe et ce depuis que nous avons créé Jazz au Mercure, nous programmons du jazz grand public. Le jazz qui swingue touche tout le monde, contrairement à ses versions plus modernes, plus contemporaines, qui intéressent avant tout des initiés. Beaucoup de personnes disent ne pas aimer le jazz parce qu’elles ont eu une mauvaise expérience avec du jazz moderne ou avec le free jazz des années 1970/1980. Voilà pourquoi nous programmons non pas une musique de spécialistes mais un jazz qui s’adresse à tous. Nous avons ainsi choisi de placer le concert de Daniel Sidney Bechet le jeudi pour offrir la possibilité aux entreprises de venir avec leurs clients ce soir-là. Ce partenariat avec des entreprises est aussi un moyen de financer le festival. Elles vont ainsi pouvoir inviter leurs employés, leurs clients, pour qu’ils puissent assister à un concert de jazz susceptible de plaire au plus grand nombre, initiés ou non. Si nous avions programmé un orchestre trop spécialisé, trop marqué dans un style, nous n’aurions pas eu le même attrait. Un constat que l’on peut étendre à tous les spectateurs.
Il faut préciser que la musique de Daniel Sidney Bechet est vraiment dans la droite ligne de ce que faisait son père.
Absolument. Lui et son quintet reprennent tous les thèmes, tous les standards de Sidney Bechet, de Petite Fleur aux Oignons en passant par Dans les rues d’Antibes… C’est pour ça que nous avons positionné ce concert le jeudi, jour où vont venir des invités qui ne sont pas forcément, voire pas du tout des habitués du jazz et qui vont peut-être en avoir la révélation à cette occasion.
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Je reviens au lieu des concerts de Toulouse en Jazz, le Sing Sing. Où se trouve-t-il exactement et à quoi ressemble-t-il ?
C’est un ancien local industriel qui se trouve Chemin de la Flambère dans le quartier Purpan. Il a été racheté par Harold Paturel, le fils du couple fondateur de l’école de danse bien connue. Harold a créé sa propre école en réhabilitant ce hangar industriel qui a été complètement réaménagé en le mettant, entre autres, en conformité avec toutes les normes acoustiques de manière à pouvoir faire des concerts à l’intérieur. Depuis l’autorisation donnée par la Mairie de Toulouse au printemps dernier, il y a déjà eu quelques soirées musicales. C’est un nouveau lieu, très intéressant, que Toulouse en Jazz va permettre de faire découvrir au public.
Quelle configuration allez-vous donner à la salle pour les concerts ? Comment les spectateurs y seront-ils installés ?
Toujours dans l’optique de faire quelque chose de différent et d’attractif, compte tenu du matériel dont nous disposons, le public ne sera pas classiquement aligné en rangs mais installé à des tables rondes avec une dizaine de chaises autour. Je remercie pour cela la Mairie de Toulouse qui nous prête du matériel pour la réalisation de ce festival. Le bar étant dans la salle, nous donnons aux spectateurs la possibilité de consommer tout en écoutant de la musique. Nous recherchons avant tout la convivialité. Il s’agit de créer une vraie ambiance « club de jazz » dans la grande tradition !
Entretien réalisé par Éric Duprix
TOULOUSE EN JAZZ / SITE INTERNET
Le programme :
Jeudi 22 mars
1ère partie : Duo de piano Blues Boogie (2 pianos à queue sur scène)
– Philippe Lejeune
– Lluis Coloma (Espagne)
2ème partie : Daniel Sidney Bechet Quintet, Hommage à Sydney Bechet
Vendredi 23 mars
1ère partie : Duo de piano Blues Boogie (2 pianos à queue sur scène)
– Renaud Patigny (Belgique)
– Lluis Coloma (Espagne)
2ème partie : Leslie Lewis et Philippe Duchemin Trio
Samedi 24 mars
1ère partie : Duo de piano Blues Boogie (2 pianos à queue sur scène)
– Renaud Patigny (Belgique)
– Philippe Lejeune
2ème partie : Nico Wayne Toussaint Quintet
Où :
Le Sing Sing, 90 Chemin de la Flambère, 31300 Toulouse-Purpan. (salle de 300 places du dancing Le Sing Sing)
Vous serez installés autour de tables et aurez accès au bar à tout moment
Tarifs – Réservations :
Entrée simple : 35 €, Etudiant (moins de 25 ans) : 25 €
Pass festival : 2 concerts, 65 € – 3 concerts, 95 €
Réservation et billetterie : 06 32 14 19 70
Réservation en ligne :
– Festik, cliquez sur : https://toulouseenjazz.festik.net/
– réseau FNAC, cliquez sur : http://www.fnacspectacles.com