Gaëlle Nohant publie chez Héloïse d’Ormesson son troisième roman, Légende d’un dormeur éveille, qui retrace la vie de Robert Desnos.
Fragments d’une vie
C’est par petites touches que l’auteur s’immisce dans la vie du poète et parcours sa biographie, comme celle d’une époque avec ces découvertes lumineuses et ces parts d’ombre.
Le roman débute en 1928 par le récit du retour de Desnos à Paris. Ce voyage marque un tournant majeur dans la vie du poète qui revient en France avec le révolutionnaire cubain Alejo. Ce dernier lui ouvre les yeux sur les grands combats d’une existence. Jusqu’ici, Desnos, qui était lui-même un défenseur des injustices, n’avait pas approché d’aussi près un esprit de révolte. Et pourtant, le cercle des surréalistes, auquel il appartient, se proclament eux-aussi comme les révolutionnaires de la littérature.
Cet épisode marque radicalement le poète qui de surcroît est de plus en plus contesté par le pape du surréaliste, André Breton. Breton lui reproche d’une part de s’écarter du vrai but de la poésie, d’écrire pour la presse, voire même de s’embourgeoiser et d’autre part d’aimer une femme mariée. Ce comportement va vite agacer Desnos qui ne veut de leçons de personne. Et encore moins en matière d’amour.
Car Desnos est un amoureux. Un amoureux tiraillé entre deux femmes très différentes. D’abord Yvonne George – chanteuse sur le déclin qui est très tourmentée – et Yuki Foujita – une femme solaire, magnifique et courtisée de tous. Desnos est ébloui par cette dernière qui le captive. Mais elle est la femme d’un autre. Le peintre Fujita qui se prend d’affection pour Desnos. Une sorte de trio domestique s’installe.
Un homme résistant
De fil en aiguille, on suit la vie et les tourments du poète qui viennent s’entrelacer à la grande histoire, celle de la seconde guerre mondiale. Desnos, libre penseur, choisira très vite son camp et entrera dans la résistance. Courageux parmi les courageux, il se bat quitte à connaître le pire des sorts, la déportation.
Un roman percutant qui donne vie à une époque
Rien n’est laissé de côté pour décrire une certaine époque. On voit les décors, on entend les musiques et on respire les embruns des lieux parcourus. Sans oublier les dialogues qui font ressortir une certaine gouaille et un air de liberté.
Les mots de Robert Desnos et ceux de Gaëlle Nohant s’entremêlent pour ressusciter la pensée du poète. Nohant se concentre sur les épisodes clés de la vie de l’homme et du poète tel des tableaux qui constituent un tout et forme la légende.
Légende d’un dormeur éveillé, fait partie de la première sélection du grand prix du roman de l’Académie française.
Sylvie V.
Légende d’un dormeur éveillé, Editions Heloïse d’Ormesson (544 pages)