C’était hier le temps des premières brochures, le modeste dépliant annonçant, tout de même l’événement, à savoir une petite dizaine de dates à la Halle aux grains de soirées musicales. Audace, ténacité, un brin d’inconscience, toupet, un ensemble opiniâtre qui conduit, quarante ans plus tard, toujours à la Halle, à une brochure qui vous propose vingt-deux dates brassant piano, chant, symphonique, chambre et jazz, de l’automne aux derniers jours du printemps. Ça s’appelle une réussite.
Catherine et Thierry d’Argoubet sont les fondateurs et responsables de ce pari qui n’a pas, à ce jour, d’équivalent sur le territoire France, mais qui participe à sa manière à ce que Toulouse est bien pour l’Unesco, Ville des Musiques.
Mais si Grands Interprètes permet à son public d’entendre et suivre des, comme on dit “pointures“, chefs d’orchestre, instrumentistes, chanteurs dans les répertoires les plus divers, du lyrique au jazz en passant par le baroque et les musiques du monde, la structure propose aussi, maintenant, des actions de sensibilisation et de médiation à l’éducation artistique qu’il s’agisse des publics éloignés pour raisons diverses et difficultés passagères.

Thierry et Catherine d’Argoubet avec Renaud Capuçon
Loin de moi l’idée, quoique, de me livrer à l’énumération de tous les petites et grands bonheurs qui vous attendent pour fêter et franchir ces quarantièmes rugissants. La brochure va se révéler indispensable de lecture. Le système d’abonnements, souple, est simple, tout simple. Il vous encourage évidemment à vous faire plaisir. C’est bien là le but des 22 dates. Et toute l’équipe de Grands Interprètes vous aidera et vous souhaitera d’être les plus nombreux possibles dans cette salle, la Halle, qui fait beaucoup parler, mais qui est toujours là avec ses plus de deux mille fauteuils qui ont permis d’applaudir déjà tant de gloires et qui vont continuer à le faire, sans doute aucun. Quelques mots cependant pour titiller votre curiosité.

Tugan Sokhiev © Jeremy Xie
Si l’on pense Orchestre, on remarque dès le lundi 3 novembre, une date, avec deux gloires de retour. À la direction du Tokyo Philharmonic Orchestra, Myung-Whun Chung, et le violoniste Maxim Vengerov, un des plus grands actuellement. On ne va pas vous faire l’affront de vous les présenter. Deux œuvres iconiques, le Concerto pour violon de Tchaïkovski et le Ballet Romeo et juliette de Prokofiev. Tout est dit.
Les liens tissés avec les fondateurs font que Tugan Sokhiev sera présent à deux reprises pour cette Quarantième. Un lundi 24 novembre avec le Münchner Philharmoniker, l’une des phalanges les plus réputées au monde, dirigée par les plus grands chefs. Puis, comme solistes, les deux frères Arthur et Lucas Jussen, duos de piano au sommet mondial. Ils joueront le Concerto pour deux pianos de Poulenc et pour suivre ce sera la Symphonie n° 4 de Tchaïkovski.
Il revient le samedi 14 mars avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France pour un Petrouchka et le Concerto pour piano de Schumann sous les doigts de Yefim Bronfman, figure tutélaire du clavier, régulièrement encensé.

Thibaut Garcia et Antoine Morinière © Picart
C’est aussi l’Orchestre National de France qui répond présent sous la direction de Yutaka Sado le lundi12 janvier dans un programme surtout Bizet mais aussi Rodrigo puisque notre soliste à la guitare favori, Thibaut Garcia nous livrera son fameux Concerto. Thibaut qui partagera avec Antoine Morinière, jeune guitariste trentenaire, couvert de prix, passionné de créations musicales, une soirée exceptionnelle à L’Auditorium Saint-Pierre, 20h, le lundi 15 décembre consacrée aux dites Variations Goldberg.
En fidèle parmi les fidèles de Grands Interprètes, Renaud Capuçon se devait d’être de retour avec son Orchestre de Chambre de Lausanne. C’est pour le vendredi 22 mai. Il est à l’archet pour le Concerto pour violon de Schumann et à la direction pour la tourbillonnante Symphonie n° 7 de Beethoven.

Aleksander Debicz et Jakub Jósef Orlinski © Honorata Karapuda
Ouverture le mercredi 8 octobre sous le signe de l’événementiel avec le contre-ténor Jakub Jósef Orlinski, une star, osons le mot, aimé, célébré adulé, un touche-à-tout au talent fou et au charisme indéniable. Il est accompagné par le piano du polonais Aleksander Debicz, aussi compositeur et arrangeur. Complètent l’ensemble, percussions et contrebasse dans un programme intitulé “letsBaRock“ essentiellement consacré à Purcell et qui ne va pas manquer de nous surprendre ! Il faut y être.
De la musique et du chant, tout droit chez Mozart avec l’étonnant nouvel orchestre Le Concert de la Loge et l’Ensemble vocal La Sportelle de Julien Chauvin le samedi 8 novembre. Ce chef nous interpelle par sa direction qu’il adapte selon les répertoires, les effectifs ou les contraintes de la partition en dirigeant du violon, de l’archet ou de la baguette, ce qui en fait tout le sel. Dans un riche programme, on retrouve la Grande Messe en ut mineur avec entre autres solistes, la mezzo-soprano Eva Zaïcik, une habituée du Théâtre du Capitole.

Orfeón Donostiarra
Grand écart et allons jusqu’à la dernière date de ce 25/26 soit le vendredi 19 juin. C’est une clôture en beauté avec ce monument de la musique et du chant que constitue de Giuseppe Verdi, l’incommensurable Requiem. Il faut un chœur, à la hauteur, ce sera l’Orfeón Donostiarra sous la direction de son chef José Antonio Sainz Alfaro. Et un orchestre, c’est Le Cercle de l’Harmonie qui aborde le répertoire concerné sur instruments d’époque mais aussi, maintenant, des ouvrages plus tardifs comme ceux du XIXè siècle. Et un chef, le charismatique Jérémie Rhorer, fondateur et directeur musical de cet ensemble depuis vingt ans. Les solistes suivront.
Auparavant, le jeudi 18 décembre, et grâce au mécénat Caisse d’Épargne, le Chœur Orfeón sera parmi nous pour des Chants de Noël au programme fort diversifié.

Pretty Yende © Gregor Hohenberg / Sony Music Entertainment
Du chant, du chant toujours le jeudi 28 mai avec en récital la voix de soprano de la jeune sudafricaine Pretty Yende accompagnée au piano par Giacomo Sagripanti, chef d’orchestre de plus en plus présent dans les fosses d’orchestre les plus prestigieuses de salles lyriques, à commencer par le Théâtre du Capitole pour le Nabucco cette année. L’ascension de Pretty Yende sur la scène internationale fut fulgurante, ses prestations recueillant tous les superlatifs depuis 2010. Leïla, Norina, Violetta, Amina, Adèle, Micaëla, Lucia, Adina, Marie…étourdissant. En langage simple, tout “marche“, les grandes scènes lyriques, les récitals, les enregistrements, les distinctions, un véritable conte de fées.

Laurence Equilbey © Jana Jocif
Du chant toujours le mardi 7 avril avec le Chœur Accentus, chœur de chambre nommé premier Centre national d’art vocal, le Monteverdi Choir, chœur fondé en 1964 par J. E. Gardiner de réputation mondiale et l’Insula Orchestra, orchestre sur instruments d’époque. Tout ce beau monde sera placé sous l’autorité de Laurence Equilbey, cheffe invitée aux quatre coins du monde. Il faut mener à bien cette partition définitive que constitue la Messe en si mineur de Jean-Sébastien Bach. Parmi les noms des solistes on relève Núria Rial, soprano, Werner Güra, ténor et Anna Lucia Richter mezzo-soprano. Grand moment en perspective.

Martha Argerich © A. Heitmann / Immagina – Warner Classics
Pas un piano mais deux ; tout d’abord, le mardi 31 mars avec Martha Argerich. Il eut été inconcevable que ne figure pas pour un tel anniversaire une telle artiste qui a fait la gloire de si nombreux rendez-vous, ne serait-ce que l’an passé encore avec, justement, ce même “friend“, friends avec lesquels elle aime tant se produire maintenant. J’ai nommé le coréen Dong Hyek Lim. Le programme suggère Beethoven, Schubert et Grieg. Mais elle peut changer au dernier moment ! On ne lui en voudra pas.

Dong Hyek Lim © Sophie Zhai / Warner Classics
Autre piano-piano, Maria João Pires, habituée des programmations du Cycle et Marc-André Hamelin, lui, plus présent à Piano aux Jacobins. Ce sera pour Mozart et Schubert. Sachons que la première est très investie sur le devenir de la planète à travers projets et ateliers Partitura tout en continuant son activité pianistique mais de façon plus parcimonieuse. Quant au second, il continue de récolter les éloges pour sa brillante technique dans les grandes œuvres du répertoire et pour son exploration intrépide des raretés des siècles passés.

David Fray © James Bort / Warner
Un peu de chambre pour musique violon-piano. Ce sera le mardi 27 janvier. Au clavier David Fray et à l’archet le prodige Daniel Lozakovitch. Ils interprèteront du Bach, Jean- Sébastien et du Beethoven. Le jeune violoniste a un début de carrière “hallucinant“ avec des commentaires du même niveau qui se résument en deux embryons de phrases : “maîtrise parfaite“ et “talent exceptionnel“. Il semble avoir déjà joué partout dans le monde. Mais partout, ce n’est pas n’importe où. Il trouve même le temps d’enregistrer. Et il a juste 24 ans ! Quant au pianiste, il est plus raisonnable peut-être, ancré dans notre région, et fondateur et directeur artistique très investi du festival “L’Offrande musicale“ né dans les Pyrénées.
Le mois de février 2026 verra la Halle accueillir deux immenses étoiles du piano. Le mardi 3, ce sera Sir András Schiff venu tout récemment avec son magnifique piano Kawai. Il est de retour et participe à l’événement avec un programme relativement éclectique mais tournant autour de l’année 1800 soit Bach, Beethoven, Schubert, Haydn, Mozart. Le musicien est réputé pour sa disponibilité envers les jeunes pianistes. Il enregistre beaucoup, s’intéresse énormément à l’interprétation sur des instruments à clavier historiques et accumule les prix.
Le samedi 21, c’est Daniil Trifonov. L’ascension est spectaculaire. Il glane trois récompenses prestigieuses parmi les plus grands concours au monde en une saison 2010-11. Il est aussi compositeur. On a écrit que …ses interprétations sont une source perpétuelle d’émerveillement…Une pianiste comme Martha Argerich le couvre d’éloges ! Il jouera bien pour nous du Haendel suivi de Brahms, mais pas n’importe quoi : Variations et Fugue sur un Thème de Haendel puis Schumann et Brahms à nouveau, mais attention, Variations sur un Thème de Schumann !

Jeff Mills © Onassis Foundation / Pinelopi Gerasimou
Avril 2026 sera le mois d’une escapade jusqu’aux musiques électroniques de Jeff Mills, légende de ces audaces des années 1980 mêlant performances et expositions dans des mix impressionnants. S’y rajoutent les percussions électroniques de son acolyte Prabhu Edouard et les claviers du deuxième larron à savoir Jean-Philippe Dary. Les improvisations vont vous surprendre mais, les artistes œuvrant sont dans leur domaine des maîtres de leur art et de leur style de musique dite techno. Grande soirée en perspective le mardi 14.
Le cycle s’est étoffé avec cette saison quatre concerts étiquetés Jazz. Ils vous seront présentés dans une prochaine chronique de Christian Authier, à savoir : le pianiste Hiromi, le clavier de Monty Alexander, Ibrahim Maalouf et le Free Spirit Ensemble, et Brad Mehldau.
Réservations : 05 61 21 09 00