L’Espace Croix-Baragnon célèbre le 150e anniversaire de la naissance d’Érik Satie avec un récital du pianiste Nathanaël Gouin.
La saison musicale des « Mardis classiques » de l’Espace Croix-Baragnon célèbre le 150e anniversaire de la naissance d’Érik Satie avec les fameuses « Notes du traducteur » de Philippe Cassard consacrées aux « Pastiches, imitations et emprunts de Bach à nos jours », et un récital du jeune pianiste Nathanaël Gouin (photo) entièrement dédié au compositeur. Ce dernier offrira notamment son interprétation des sept « Gnossiennes », trois « Gymnopédies » et autres « Sports et divertissements », etc.
D’abord considéré comme un «amuseur» ou un «mystificateur» par ses compatriotes, Érik Satie devient le musicien français le plus vénéré par l’avant-garde internationale lorsque John Cage rend hommage à son travail de pionnier. Né à Honfleur, le 17 mai 1866, il jouit aujourd’hui d’une grande popularité grâce à ses œuvres les plus jouées que sont les « Gymnopédies » et les « Gnossiennes », partitions épurées, à la fois avant-gardistes et accessibles. Compositeur de la musique des ballets « Parade » et « Relâche », il s’inscrit notamment en rupture avec les conventions du romantisme.
Anticonformiste permanent, Satie tourne le dos à l’impressionnisme et au wagnérisme pour se ranger du côté des dadaïstes. Il signe des œuvres humoristiques et fantasques, donnant des titres improbables à la plupart de ses pièces pour piano: « Ogives » (1886), « Pièces froides » (1897), « Morceaux en forme de poire » (1903), « Prélude en tapisserie » (1906), « Quatre préludes flasques (pour un chien) » (1912), « Embryons desséchés » (1913), « Sports et divertissements », « Les Trois Valses distinguées du précieux dégoûté » (1914), « Sonatine démocratique » (1917), etc.
Ses premières pièces, les « Gymnopédies », sont publiées dès 1887 par son père. Installé à Montmartre, il travaille alors comme pianiste-accompagnateur au cabaret Le Chat Noir, où il se lie avec Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine ou Claude Debussy. Il compose au hasard de ses fréquentations, livrant « le Fils des étoiles » pour l’ordre de la Rose-Croix du Sar Peladan, « Uspud (ballet chrétien) » avec le poète Contamine, les « Danses gothiques » puis « Vexations » au moment de sa liaison avec Suzanne Valadon. Il est contraint pour vivre de se consacrer à l’écriture de nombreuses mélodies frivoles destinées au music-hall : « Je te veux », « Allons-y Chochotte », « Tendrement », etc.
Satie était une figure si pittoresque que sa musique reste indissociable de cette personnalité foisonnante. Artiste engagé, il avait adhéré au parti radical-socialiste, puis à la S.F.I.O et au parti communiste. Auteur de divers manifestes, il a fondé l’Église métropolitaine d’Art de Jésus-Conducteur, destinée à combattre la société par les moyens de la musique et de la peinture et dont il sera le chef et le seul adepte, lançant des anathèmes contre les personnalités les plus en vue de son temps. Se tenant à l’écart de la vie mondaine parisienne, il méprisait ouvertement les critiques musicaux. Musicien inclassable, il ne cessait de remettre en question son esthétique dont se réclameront de jeunes musiciens réunis dans le groupe des Nouveaux Jeunes, le Groupe des Six, et l’École d’Arcueil.
« Avec son pince-nez toujours un peu de travers, sa barbe en pointe et son long nez, ses yeux en coulisse et son sourire moqueur, il avait un air de faune qu’il ne perdit jamais, même quand, sur ses vieux jours, il se fit ermite : cet ironique devint alors l’innocence même. Mais n’y a-t-il point une innocente ironie ? L’homme le plus versatile du monde », écrivait alors le musicologue Paul Landormy.
Jérôme Gac
N. Gouin (piano), mardi 6 décembre, 18h15 ;
P. Cassard (piano), mardi 13 décembre, 18h15 et 21h00.
À l’Espace Croix-Baragnon, 24, rue Croix-Baragnon, Toulouse.
Tél. : 05 62 27 60 60.
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photo: Nathanaël Gouin © Caroline Doutre