La comédienne Julie Pichavant reprend à l’Espace Job son « Syndrome Marilyn », spectacle-performance cent pour cent féminin qui s’inscrit pertinemment dans le cadre de la Journée internationale de la femme !
On a tous quelque chose en nous de Marilyn… Que l’on ait eu son poster dans sa chambre d’adolescent ou que l’on ait fredonné sous la douche le fameux «boop-boop-a-doop» de « I wanna be loved by you », que savons-nous au juste de Marilyn Monroe ? Fidèle comédienne du Théâtre 2 l’Acte de Michel Mathieu, Julie Pichavant empoigne la figure de la star avec un projet personnel découvert en, 2011 à la Cave Poésie : « Syndrome Marilyn », dont elle est l’auteur, la metteur en scène et l’interprète. Dans ce spectacle, performance retravaillée notamment au Théâtre Le Vent des Signes, Julie Pichavant reçoit les spectateurs en blouse blanche et chaussée de lunettes, telle un professeur «ès Marilyn Monroe». La blonde toulousaine est ainsi prête à disséquer sous nos yeux la blonde américaine, à ouvrir les entrailles du mythe afin d’y chercher l’être, à faire surgir les failles de la femme sous les innombrables effigies glamour de l’icône momifiée depuis des générations.
Alors, Julie Pichavant la transformiste laisse tomber la blouse pour endosser les attributs et attitudes de l’actrice légendaire – perruque blonde, maquillage strass et robe corolle. Aux côtés de cette Marilyn de cabaret, cinq clones approximatifs de Marilyn, tous sexes confondus, vont se disputer le monopole identitaire de la star hollywoodienne : brandissant dans un défilé de mode, qui un abattant de cuvette de toilette ou des rouleaux de papier hygiénique, qui un paquet de chips ou de bonbons, tous estampillés «Marilyn».
«Mangez Marilyn, chiez Marilyn…». Corps-fantasme devenu ad nauseam tête de gondoles de tous les supermarchés du monde entier. Femme monstre fabriquée de toutes pièces et jetée en pâture à la société du spectacle. Véritable écrivain de plateau, Julie Pichavant crée là un objet plastique qui mêle le théâtre, la forme cabarétique et la vidéo – utilisée parcimonieusement – avec une énergie communicative et un talent de performeuse indéniable. Investie, incarnée, à l’aise dans tous les registres de jeu, elle ne se ménage pas. Elle règle ses comptes de femme et de comédienne, y compris avec les hommes, brouillant les pistes identitaires entre l’actrice, le personnage, la personne. Le spectacle ludique, vivant, interactif est joyeusement foutraque.
Avec toutefois ce basculement de la comédie débridée à des moments plus fragiles, plus vrais, qui posent de vraies questions existentielles et sociétales sur l’objectification du corps féminin, la représentation, le besoin d’images et de symboles d’un monde en mal d’incarnation. Que cachait Norma Jeane Baker sous l’artifice de ses photos glamour et de ses sourires figés ? Quelle intériorité se nichait dans ce corps surmédiatisé ? Que penserait le sujet Marilyn de l’objet Marilyn ? Quel héritage a-t-elle laissé aux femmes ? Du vrai spectacle pour ce « Syndrome Marilyn » aux allures de crise identitaire punk où le champagne aurait remplacé la bière !
Sarah Authesserre
une chronique de Radio Radio
Mardi 8 mars, 20h30, à l’Espace Job,
105, route de Blagnac, Toulouse. Tél. 05 31 22 98 72.
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