« Le chemin de Leonskaja est un chemin de cimes. Par le dépassement de soi, l’exigence, la passion et l’intelligence, elle se place au rang des plus grands, non seulement d’aujourd’hui mais de l’époque : au rang d’une Clara Haskil ou d’un Lipatti, la modernité en plus ». André Boucourechliev (Paris)
Les amateurs la connaissent bien car, grâce au festival Piano aux jacobins, 36è du nom, l’artiste s’est produite à maintes reprises au Cloître.
Elle nous revient le lundi 14 septembre avec un programme consacré à Brahms, Liszt et Schubert.
Du premier, ce sera la Sonate n°3 en fa mineur suivi de Sonnet de Petrarque n°104 de ce cher Franz. Toute la seconde partie, c’est bien sûr d’un autre Franz, Schubert ici, pour un monument du répertoire, la Sonate n°19 en ré majeur, op.53 D 850.
Mais, si vous n’avez pu obtenir un billet pour ce récital, peut-être aurez-vous un peu plus de chance avec l’Orchestre national du Capitole de Toulouse, notre ONCT. En effet, sous la direction de son Directeur musical, Tugan Sokhiev, Elizabeth Leonskaja interprètera le Concerto pour piano en la mineur d’Edward Grieg. C’est le concert d’ouverture de l’orchestre à la Halle. Il débute avec une page de Franz Schubert, l’Ouverture de Rosamonde. En deuxième partie, il a choisi la Huitième Symphonie d’Antonin Dvorak qu’on ne présente plus.
« J’entretiens une relation musicale très forte avec Elisabeth Leonskaja, confie Tugan Sokhiev. C’est une très grande pianiste, de la grande époque, qui apporte quelque chose de très particulier dans le répertoire romantique. » C’était il y a deux ans lors du concert à la Halle quand il dirigeait le Deuxième Concerto de Brahms.
«La dernière grande Dame de l’Ecole Soviétique » écrit un journaliste français et un critique espagnol la qualifie d’anti-diva. Ils ont raison tous les deux.
Depuis plusieurs dizaines d’années, Elisabeth Leonskaja compte parmi les pianistes les plus fêtés de notre époque. Dans un monde dominé par les médias, Elisabeth Leonskaja reste fidèle à elle-même et à la musique, dans la pure tradition des grands interprètes soviétiques comme David Oïstrakh, Sviatoslav Richter ou Emil Gilels qui, malgré les conditions politiques les plus pénibles, restaient toujours soucieux de la quintessence de la musique. Sa modestie quasi légendaire accentue encore sa timidité face aux médias. Mais dès qu’elle entre en scène, le public sent la force qu’elle tire de son dévouement pour la musique.
Au piano, l’artiste se livre toute entière, dans chaque phrase, chaque nuance de l’œuvre qui s’égrène sous ses doigts de virtuose accomplie. Mais là n’est pas sa seule qualité. Le répertoire est immense et pourtant, elle sera chaque note, caressante comme brutale. « A la manière d’une éminence poétique, dont les dix doigts sont autant d’avatars sensitifs, entrepris d’un élan qui les pousse au dépassement… »
Née d’une famille russe à Tbilissi en Géorgie, elle fut considérée comme une enfant prodige et donna ses premiers concerts à l’âge de 11 ans. Son talent peu commun lui ouvrit les portes du Conservatoire de Moscou. Alors qu’elle y était encore étudiante, elle gagna des prix aux concours internationaux de renom : Enesco, Marguerite Long et Queen Elisabeth.
L’évolution musicale d’Elisabeth Leonskaja a été marquée par sa coopération avec Sviatoslav Richter. Ce pianiste de génie a su reconnaître son exceptionnel talent dont il a assuré la promotion non seulement par des leçons et des conseils, mais également en l’invitant à jouer en duo avec lui dans le cadre de différents concerts. Un tel duo est un événement musical ! L’amitié musicale et personnelle qui liait Sviatoslav Richter et Elisabeth Leonskaja n’a pris fin qu’avec le décès de Richter en 1997. En 1978, Elisabeth Leonskaja quitta l’Union Soviétique pour s’établir à Vienne. Son remarquable concert au Festival de Salzbourg en 1979 a marqué le début de sa carrière concertante dans les pays de l’Ouest.
Elisabeth Leonskaja a joué en soliste avec pratiquement tous les orchestres de premier plan sous la direction des plus grands chefs. Elisabeth Leonskaja est régulièrement l’hôte fort appréciée des principaux festivals d’été comme le Festival de Salzbourg, les Festwochen de Vienne, Lucerne Festival, le Festival du Schleswig-Holstein et la Schubertiade de Hohenems, mais aussi des soirées pianistiques régulièrement données dans les grandes métropoles de la musique. Toutes ces activités de soliste ne l’empêchent d’ailleurs pas d’accorder une part importante de son travail à la musique de chambre et de donner fréquemment des concerts avec les quatuors Emerson, Borodin et Artemis.
Une discographie considérable témoigne du haut niveau artistique de cette pianiste de talent et lui ont valu de très grandes récompenses.
Son pays d’élection, l’Autriche, a rendu honneur au travail d’Elisabeth Leonskaja: elle est Membre d’honneur du Konzerthaus de Vienne et a reçu en 2006 la Croix Fédérale du Mérite de première classe, la plus importante distinction d’Autriche qui lui a été décernée pour sa contribution à la vie culturelle du pays. Aujourd’hui, la « Lionne du clavier » est une pianiste mûre toujours aussi exceptionnelle qui sait faire passer sa virtuosité au second plan.
Michel Grialou
vendredi 18 septembre 2015
Halle aux Grains – 20h00
Réservation
Orchestre National du Capitole
Festival International Piano aux Jacobins