Voilà bien un film dont je n’aurais, dans l’absolu, pas besoin de vous causer tant on en entend parler depuis quelques jours. Le battage médiatique autour de Guillaume Gallienne et de son Les garçons et Guillaume, à table ! pourrait même commencer à échauffer sérieusement les oreilles de certains d’entre vous.
Et bien on va dire que c’est pour toi, spectateur probablement agacé par cette surexposition prévoyant un boycott de ce long – métrage (tant tu en as assez et déjà l’impression d’en connaître le contenu*), que je vais oeuvrer aujourd’hui. Car je tiens à toi spectateur probablement agacé (à toi et à tous tes semblables qui viennent faire un tour ici, bonjour les gens !) et je m’en voudrais que tu te prives d’une belle histoire parce que les médias ne sont pas bien inventifs et qu’ils usent jusqu’à la trame le bon filon sur lequel ils ont réussi à mettre la main.
Comme tu le sais surement spectateur probablement agacé, Guillaume Gallienne parle ici de sa vie en adaptant pour le cinéma son spectacle du même nom, spectacle qui parlait de son enfance et de son adolescence. Il y racontait comment une tournure sémantique involontairement ironique de sa mère (celle du titre) allait le pousser dans une très grande confusion.
Issu d’une famille de la haute bourgeoisie, l’acteur se trouve être le troisième d’une fratrie, avec au – dessus de lui deux grand frères, beaux, sportifs, virils, très complices avec leur père. Le petit Guillaume ne cadre pas vraiment dans ce portrait de famille, lui qui déteste le sport, vénère l’impératrice Sissi et voue une admiration sans bornes à sa mère. Pour tenter de se démarquer de ses encombrants frangins et attirer l’attention de cette mère aimante mais lointaine et souvent cinglante, il va se mettre à l’imiter, à » faire la fille « . Et cela va tellement bien marcher qu’il va peu à peu se persuader qu’il en est une. Tandis que le reste de sa famille va être convaincu de son homosexualité.
Que je te dise spectateur probablement agacé, si par malheur tu ne supportes vraiment pas Guillaume Gallienne, tu ferais mieux de passer ton chemin. Car il est (pratiquement) de tous les plans. Derrière et devant la caméra, il raconte avec un humour extraordinaire, beaucoup de finesse et un grand sens de la dérision, une période de sa vie qui a fait l’homme et le comédien qu’il est aujourd’hui.
Car Gallienne est un acteur – né, possédant une extraordinaire faculté d’observation et de mimétisme. Interprétant son propre rôle ainsi que celui de sa mère, il est bluffant de voir à quel point il a su s’approprier des façons d’être ou de se mouvoir typiquement féminines (sa démarche, lorsque la caméra le suit, en est un des exemples criants). Il en va de même pour l’imitation vocale maternelle qu’il maîtrise si bien que son entourage les confond régulièrement.
Les garçons et Guillaume, à table ! c’est l’histoire de quelqu’un qui se cherche et va en passer par bien des montagnes russes émotionnelles : séjour linguistique hispanique déroutant et dansant, pensionnat picard exclusivement masculin puis collège anglais excentrique, nombre visites plus ou moins abouties chez des psychologues de tout poil.
Le film est un petit bijou d’humour, oscillant sans cesse entre le très drôle (ah le séjour en Bavière !) et le beaucoup plus émouvant (la scène de la piscine sur fond du morceau » don’t leave me now « ), avec en pointillé une réelle déclaration d’amour à une mère ainsi qu’à toute la gent féminine.
Bien que Les garçons et Guillaume, à table ! ne porte en aucun cas l’étendard de la cause homosexuelle, il prône la différence, la tolérance (par les temps qui courent, c’est appréciable), le droit à l’erreur et illustre parfaitement la notion de résilience.
Avec de tels arguments, je me dis qu’il se pourrait même cher spectateur probablement agacé que tu passes de ton statut actuel à celui de spectateur éventuellement intéressé.
En vous remerciant.
* : ça m’arrive souvent, alors forcément, je fais un transfert !