« L’Ami, François d’Assise et ses Frères » un film de Renaud Fély et Arnaud Louvet
Ni austère, ni pesant, ni religieux, ni froid, ce film est une ode bouleversante à un homme épris d’un amour « excessif » pour son prochain.
Les coréalisateurs de ce long métrage avaient ce personnage en tête bien avant l’accession au trône pontifical de François, précisent-ils à bon escient. Dans ce qui est tout sauf un biopic ou une reconstitution historique envahissante, ils nous parlent de François d’Assise mais, et c’est particulièrement malin et signifiant, au travers du regard que porte sur celui qui sera canonisé en 1228, un autre personnage, Elie de Cortone. Celui-ci est l’un des premiers à rejoindre la Fraternité de François, se retrouvant dans cette recherche de l’humilité, de la pauvreté, du don de soi. Il est aussi celui qui « trahira » François, alors fatigué, presque aveugle, en rédigeant une nouvelle Règle admise enfin par le Saint Siège, compromis entre idéal et une certaine realpolitik, une Règle indispensable à l’accession de la Fraternité au statut de l’Ordre, une Règle qui les mettait à l’abri de l’hérésie.
Ce film est l’histoire de ce conflit, une histoire qui nous est racontée avec une simplicité qui sied parfaitement au « héros » de cette aventure humaine. L’homme qui parlait aux oiseaux, et dont Olivier Messiaen a fait le personnage principal de son opéra Saint François d’Assise, créé en 1983, nous parvient ici dans toute sa candeur, sa naïveté, sa force aussi et son indestructible foi sous les traits lumineux et habités d’Elio Germano. Jérémie Renier se glisse dans la soutane d’Elie avec une authenticité de ton qui subjugue par sa puissance de caractère et de conviction. Il Poverello et ses rêves magnifiques n’y peuvent rien. Mais fidèle jusqu’à la démesure, François ne faillira pas, s’éteignant en 1226, à l’âge de 44 ans, épuisé, portant les stigmates du Christ. Ayant accompli des miracles, il est canonisé deux ans après.
Ce que raconte en creux ce film, c’est aussi l’imperturbable fracture sociale qui, depuis la nuit des temps et jusqu’à nos jours, frappe les plus démunis, ostracise des pans entiers d’êtres humains et fait régner le pouvoir de l’argent.
Robert Pénavayre
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Elio Germano, un rôle à la mesure de ses engagements
Il se voulait bédéiste, il sera comédien. Au théâtre d’abord où il débute à 14 ans. Puis les inévitables séries tv, enfin le 7ème art. Cet Italien de 36 ans a plus de 40 films à son corpus. De très grands l’ont réclamé, comme par exemple Ettore Scola, Abel Ferrara, Michele Placido, Rob Marshall et bien d’autres. La France l’a pour ainsi dire découvert lorsqu’il a partagé, avec Javier Bardem, en 2010, le Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes pour le film La nostra vita. Les récompenses pleuvent alors sur les épaules de ce rappeur, en particulier le Globo d’oro en 2012 pour le rôle principal dans Magnifica presenza. Préoccupé par la montée de la Ligue du Nord dans son pays, il n’hésite pas à s’engager personnellement dans un combat au profit des isolés, fréquentant les squats, les milieux alternatifs et associatifs. C’est sûr qu’il n’a pas dû beaucoup hésiter à revêtir la bure du Saint d’Assise.