« Gatsby le magnifique », un film de Baz Luhrmann
On ne peut pas dire que cet Australien d’aujourd’hui 50 ans envahisse le 7ème art. Et pourtant, avec ses 4 films, il occupe une place significative dans le panorama du microcosme cinématographique, grâce en particulier à des titres tels que Roméo+Juliette en 1996 et Moulin Rouge ! en 2001. Présenté hors compétition et en ouverture du 66ème Festival de Cannes, son Gatsby , formidablement marketé autour de Leonardo DiCaprio, n’est peut-être pas à la hauteur de ce que l’on attendait du quinquagénaire. Bien sûr il y a toujours le côté flamboyant de sa mise en scène, et la première heure de ce film de 2h22 en est une démonstration sans appel. Une démonstration tonitruante, stroboscopique, épileptique, rendant quasiment impossible la lecture du sous-titrage, un gigantesque clip dans des décors et une numérisation à couper le souffle. Problème, à ce moment-là, les personnages n’existent toujours pas. Ils sont comme des pantins perdus au milieu d’un océan de paillettes. Comment alors ne pas voir dans ces scènes le miroir fracassant de l’industrie du cinéma… Puis tout se calme, Baz Luhrmann change de braquet et commence à diriger ses comédiens : Leonardo DiCaprio (Gatsby totalement coincé, comme tétanisé ?), Tobey Maguire (Nick assez crédible) et, surtout, Carrey Mulligan (somptueuse Daisy, à vrai dire la seule véhiculant une émotion). Le roman éponyme que F. Scott Fitzgerald écrivit en 1925 peut alors refaire surface en même temps que cette Amérique des années 20 du siècle dernier, croulant sous l’argent, la corruption, la libéralisation des mœurs et se précipitant, au plongeant dans des piscines de champagne vers la plus grande catastrophe économique de sa jeune histoire. Dommage tout de même que nous ne retrouvions pas ici la liberté de ton, l’originalité et l’engagement que ce metteur en scène avait déployés pour nous parler des amants de Vérone.
Robert Pénavayre