Le 6 mars dernier, à la Halle aux grains, l’Orchestre national du Capitole célébrait une fois de plus la jeunesse du compositeur, dans le cadre de l’Opération Mozart. Dirigé par le chef et violoniste italien Fabio Biondi et avec la participation du grand pianiste français Alexandre Tharaud, la formation symphonique toulousaine illustrait « Le B.A. BA de Mozart » avec une programmation musicale d’œuvre composées avant l’âge de 21 ans.
Une ouverture d’opéra, un concerto pour piano et orchestre et pas moins de trois symphonies se succèdent au cours de cette soirée aux accents joyeux.
L’ouverture de l’opéra Lucio Silla reflète la fibre italienne du compositeur de seize ans. Représenté en 1772 sur la scène du Teatro Regio Ducale de Milan, l’ouvrage reçoit un franc succès. Son ouverture en trois parties distinctes évoque une symphonie en miniature. Sous la baguette vive et animée de Fabio Biondi, l’orchestre, en formation « Mozart » (une trentaine de musiciens, comme il se doit), scintille d’une vive lumière.
Lui succède le Concerto pour piano et orchestre n° 9 en mi bémol majeur, dit « Jeunehomme », daté de 1777. Le « Jeunehomme » en question est en fait ici la dédicataire de l’œuvre, une jeune pianiste française dont le nom d’origine, Victoire Jenamy, a été, volontairement ou non, transformé au cours des échanges épistolaires. Le piano s’impose dès la première mesure de l’orchestre. Alexandre Tharaud y déploie dès l’ouverture une belle sonorité, d’une profondeur équilibrant l’ampleur orchestrale. Curieusement, le soliste semble prendre une certaine distance avec la légèreté du style galant en vigueur à cette époque. Les thèmes de l’Allegro sont amplement développés, avec un certain sérieux, alors que dans l’Andantino une ombre plane jusqu’à la manifestation d’une douleur, d’une plainte à peine esquissée. L’Allegro final résonne comme une joyeuse délivrance. Le public, venu nombreux, réclame un bis qu’Alexandre Tharaud accorde généreusement. Il s’agit de sa propre transcription pour piano de la Sicilienne de la Sonate pour flûte et clavecin BWV 1031 attribuée à Johann Sebastian Bach. Certains musicologues estiment que cette pièce, du moins en partie, est écrite par le fils du Cantor, Carl Philipp Emanuel. Quoiqu’il en soit, le style de Bach y est bien présent.
Toute la seconde partie de la soirée est consacrée à un trio de ces symphonies de jeunesse que le chef et violoniste aborde avec un esprit légitime de liberté. Fabio Biondi apparaît avec son violon qu’il va jouer en tant que « Konzertmeister » de l’ensemble orchestral. Il va même solliciter les autres chefs de pupitre, second violon, alto, violoncelle pour participer à quelques échanges souvent pratiqués dans les symphonies concertantes, une habitude courante à l’époque de Mozart.
La Symphonie n° 11 en ré majeur date de 1770. Mozart l’a donc écrite à l’âge de quatorze ans. Ses trois courts mouvements respirent la joie et la bonne humeur. Le chef y suscite de courts et charmants duos avec le chef de pupitre des seconds violons Fabien Mastrantonio.
Le compositeur a 18 ans lorsqu’il compose sa Symphonie n° 30 qui réclame un pupitre supplémentaire de deux trompettes. Le ton énergique de la partition est parfaitement soutenu par le chef qui s’implique comme soliste autant que comme chef. L’alto solo Bruno Dubarry et le violoncelle solo Pierre Gil sont appelés à rejoindre les deux violons pour quelques interventions concertantes. Le Presto final se termine étrangement, comme sur des points de suspension. Le jeune Mozart aimait les plaisanteries. Il a même composé « Ein musikalischer Spaß » (Une plaisanterie musicale) destinée à se moquer de ses collègues…
La concert s’achève avec la Symphonie n° 13 en fa majeur composée en 1771, à l’âge de 15 ans. Avec son Allegro initial presque dramatique, elle déploie un très bel Andante et un Menuetto particulièrement dansant. Le Molto allegro final voit le retour des quatre cordes solistes selon l’initiative raffinée de Fabio Biondi.
Décidemment le long week-end Mozart s’est ouvert à la découverte.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Orchestre national du Capitole