Chaque mercredi, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir un film américain passé inaperçu lors de sa sortie.
Le réalisateur John Dahl, né en 1956, fut remarqué à la fin des années 80 et au début des années 90 avec des films noirs efficaces et racés comme Kill Me Again, Red Rock West ou Last Seduction avec une Linda Fiorentino inoubliable en femme fatale. Les films suivants témoignèrent encore de ses talents, notamment Les Joueurs, mais l’étoile du cinéaste pâlit et c’est vers la télévision qu’il se tourna. On le retrouva dès lors à la réalisation d’épisodes de Californication, Dexter, Justified, House of Cards et bien d’autres. Avant cela, il y eut un ultime long-métrage (du moins à ce jour), sans doute son meilleur : You Kill Me sorti en catimini dans les salles françaises à l’été 2007.
Tueur au sein de la mafia polonaise de Buffalo, Frank a un problème avec l’alcool. Lors d’un contrat important visant à abattre le chef de la pègre irlandaise qui compte s’installer dans la ville, Frank s’endort. Roman, le patriarche des gangsters polonais, décide de d’envoyer le tueur défaillant en cure de désintoxication à San Francisco. Là-bas, sous la surveillance d’en agent immobilier véreux, Frank se rend aux réunions des Alcooliques anonymes, travaille aux pompes funèbres et décroche peu à peu. Mieux encore, il rencontre la séduisante Laurel. Mais, pendant ce temps à Buffalo, la guerre des gangs tourne au désavantage des Polonais et la gâchette de Frank fait défaut…
Avec cette histoire naviguant entre le polar et la comédie, Dahl réussit un subtil cocktail où l’humour (certes noir) l’emporte au final. De fait, on rit beaucoup devant les pérégrinations de Frank s’efforçant d’abandonner la boisson (avec toutefois des rechutes, comme lors d’une cocasse cérémonie de deuil irlandaise qui tourne à la beuverie générale) afin de retrouver la plénitude de ses capacités professionnelles. Là encore, ses interventions dans les réunions des Alcooliques anonymes valent le détour. Par ailleurs, le film repose en grande partie sur les épaules et la géniale composition de Ben Kingsley. Crâne rasé, souvent coiffé d’un bonnet, élégamment vêtu de noir : il interprète un tueur charmeur, taraudé par la culpabilité, drôle, attaché à son métier et d’une sincérité à toute épreuve. A ses côtés, Téa Leoni, manière de beauté froide sûre de sa séduction, est parfaite tandis que le reste du casting (Luke Wilson, Philip Baker Hall, Dennis Farina, Bill Pullman) est également de très haut niveau. Un bon scénario, de bons acteurs, une belle photographie, une mise en scène efficace et sans esbroufe : que demander de plus ? Rien, sinon de nouveaux films de John Dahl…