A propos du projet vénézuélien de développement musical des jeunes, baptisé El Sistema, le grand chef d’orchestre Sir Simon Rattle a déclaré : « This is the most important thing happening in the world in classical music. » (C’est la chose la plus importante qui se passe dans le monde en musique classique). L’écrivaine américaine, musicienne et professeur de musique Tricia Tunstall signe là un ouvrage qui raconte l’histoire de ce grand projet éducatif dont le monde ferait bien de s’inspirer.
A travers divers récit de voyage effectués au Venezuela mais aussi aux Etats-Unis où le projet a essaimé, l’auteur décrit sa découverte de cette pratique musicale sur le terrain même où elle est née et s’est développée.
Tout a commencé voici quarante ans lorsque onze jeunes gens d’origine modeste se sont réunis dans un garage souterrain de Caracas afin de faire de la musique ensemble, ceci sous la conduite d’un organiste, ingénieur et politicien visionnaire, José Antonio Abreu.
Aujourd’hui, près d’un million d’enfants des milieux les moins favorisés du pays participent à cette entreprise qui se veut non seulement musicale, mais aussi, et peut-être surtout, sociale.
Le fondateur du projet déclare à juste titre:«Si vous mettez un violon dans les mains d’un enfant nécessiteux, il ne prendra pas une arme à feu.» Voici qui rejoint la phrase attribuée à notre Victor Hugo : Celui qui ouvre une école, ferme une prison.»
La philosophie d’El Sistema consiste à enseigner la musique, non pas individuellement, mais en groupe. Comme le décrit Tricia Tunstall, une multitude de « núcleos » (noyaux) sont fondés dans la plupart des écoles et des villes du pays, afin d’offrir aux jeunes des bidonvilles une structure qui les accueille et leur fait découvrir la pratique orchestrale. Les plus aguerris, les plus avancés, aident les débutants. La solidarité joue à fond, en lieu et place de la compétition. De nombreux orchestres de niveaux progressifs sont ainsi formés dans tout le pays. Les répertoires sont adaptés aux possibilités de chacun, mais aucun compromis n’est envisagé avec la qualité des œuvres jouées. Beethoven, Bizet, Mahler sont au programme des concerts auxquels ces tout jeunes musiciens sont amenés à participer. La qualité musicale atteinte par ces orchestres est attestée par celle des grandes phalanges qui parcourent le monde depuis quelques années. Un récent concert Grands Interprètes à Toulouse de l’Orchestre des Jeunes de Caracas en atteste hautement. La venue en janvier 2016, toujours à Toulouse, de la quintessence que représente l’Orchestre des Jeunes Simón Bolívar, dirigé depuis des années par le chaleureux Gustavo Dudamel, devrait encore confirmer cette réussite. D’ailleurs, la nomination de ce dernier à la tête du Los Angeles Philharmonic Orchestra, a sonné le départ d’un projet voisin d’El Sistema aux Etats-Unis.
Au fil des pages, Tricia Tunstall nous fait ainsi découvrir de jeunes enfants en déshérence qui trouvent dans ce projet une porte ouverte vers la socialisation. Ses rencontres avec José Antonio Abreu et Gustavo Dudamel nourrissent la richesse des liens qui rassemblent les participants d’El Sistema, du plus jeune des musiciens débutants jusqu’aux animateurs que certains deviennent au fil des ans.
Certains projets nationaux hérités du Venezuela, en particulier aux USA et en France sont également abordés dans les derniers chapitres. Les quelques approximations ou maladresses de traduction n’entament pas l’intérêt fondamental de ce sujet sur lequel tous les pays devraient se pencher. La musique au service du vivre ensemble !
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
« Changer des vies par la pratique de l’orchestre » par Tricia Tunstall – SYMETRIE
Les Grands Interprètes
Orquesta Sinfónica Simón Bolívar de Venezuela
Gustavo Duhamel (direction) – Yuja Wang (piano)
vendredi 08 janvier 2016 – Halle aux Grains
Mécénat / Partenariats
Nathalie Coffignal
mail : ncoffignal@grandsinterpretes.com
Tel : 05 61 21 09 61
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