Avant un nouvel album programmé pour la mi-2026, Alex Beaupain connaît un bel automne. Le chanteur a participé au premier disque de son ami Vincent Dedienne, « Un lendemain soir de gala », qu’on pourra découvrir sur la scène de la salle Nougaro, à Toulouse, les 16 et 17 décembre. Il a également composé la musique d’un des films les plus drôles de l’année, « La femme la plus riche du monde », de Thierry Klifa, dont la sortie aura lieu le 29 octobre. Rencontre.

Alex Beaupain. Photo Vincent Desailly
Pour son premier album, l’aspirant chanteur Vincent Dedienne a fait appel à plusieurs artistes dont Vincent Delerm, Juliette, Guillaume Aldebert, Jeanne Cherhal, Ben Mazué, Adrien Gallo ou Albin de la Simone. Comment êtes-vous arrivé sur le projet ?
Je connais Vincent Dedienne depuis son premier spectacle au Café de la Danse, il y a dix ans. Il avait alors souhaité me rencontrer, affirmant qu’il aimait bien mon travail… ce qui fait toujours plaisir. Depuis, je lui ai proposé plusieurs fois de venir chanter avec moi, sur scène ou à la télévision. On s’était aussi retrouvés, l’an dernier, sur le film « Joli, joli », de Diastème, dont j’avais écrit et composé les chansons. J’avoue que j’étais d’abord dubitatif sur son projet d’album, censé prolonger le spectacle « Un soir de gala » sous une forme musicale, chacun des artistes sollicités s’inspirant d’un passage du one-man-show pour imaginer une chanson. Jespérais que chacune puisse avoir sa propre vie en dehors même du spectacle qui l’avait inspirée. Ce qui est bien le cas à l’arrivée grâce à l’ensemble du casting, réunissant des gens dont j’aime l’écriture.
Pourquoi avoir proposé « Soldat inconnu », sur le thème des enterrements des célébrités comparés à ceux des inconnus ?
Parce que je suis le chanteur des cimetières ! (rire) J’ai quand même à mon actif plusieurs chansons de deuil. Et je suis heureux aujourd’hui de ne pas être celui qui « chouine », laissant à Vincent Dedienne le soin de le faire à ma place. J’aime sa voix nasale, son style un peu désuet (ce n’est pas péjoratif), son côté Rive Gauche, à la Anne Sylvestre (à laquelle le disque est dédié, NDLR). En piano-voix, tel que nous avons pu le faire récemment sur deux chansons, sur France Culture, c’est formidable (1).
Quel souvenir avez-vous du spectacle initial, qui a triomphé, à Paris et en tournée, entre 2021 et 2024 ?
Je l’ai vu trois fois tellement je l’ai trouvé drôle. Cela résume assez bien la personnalité de Vincent Dedienne, qui peut être à la fois poétique et grinçant. Il a notamment eu une idée géniale : faire installer un beau piano sur scène…et ne jamais l’utiliser.
Votre actualité, c’est aussi la sortie de « La femme la plus riche du monde », dont vous avez composé la musique. Comment travaillez-vous avec Thierry Klifa, le réalisateur ?
Nous avons commencé notre collaboration avec trois pièces de théâtre, interprétées par Fanny Ardant. Dans la dernière, « Croque-monsieur », elle reprenait un rôle créé par Jacqueline Maillant, portait perruque blonde et donnait la réplique à Bernard Ménez. Au cinéma, notre trio s’est reformé pour « Les rois de la piste ». A chaque fois, je me suis bien entendu avec Thierry Klifa. C’est quelqu’un de très agréable, extrêmement cinéphile et mélomane. Il m’a parlé de sa passion pour le cinéma des années 1970, des partitions de François de Roubaix pour « Dernier domicile connu » et d’Ennio Morricone pour les films d’Henri Verneuil. Morricone qui est pour moi le plus grand compositeur de musiques de films et dont le sommet est « Il était une fois en Amérique ». Thierry Klifa est aussi généreux avec ses collaborateurs : il leur donne de la place, accepte leurs propositions. Pour « La femme la plus riche du monde », il m’a laissé jouer avec le genre, entre comédie et farce.
Qu’aimez-vous dans ce film s’inspirant de l’affaire Bettencourt, de cette étrange amitié, à la fois provocatrice et tendre, entre une milliardaire et un photographe homosexuel mondain ?
Dans le rôle du photographe, Laurent Lafitte est extraordinaire. Il ose des trucs qu’on n’ose plus. En pédé à l’ancienne, son numéro de cabotinage est réjouissant ; il nous fait penser à Michel Serrault. Marina Fois (qui joue l’héritière ultra coincée, NDLR) est de la même famille d’acteurs: elle n’hésite pas à aller à fond dans le ridicule physique.
Le film a été présenté au Festival de Cannes, hors compétition…
Le meilleur moment, avec Cannes, c’est quand on t’apprend que tu y vas. On sait que la projection dans la grande salle Lumière sera magnifique, qu’il y aura une fête. Sur place, je ne me sens pas forcément à l’aise, même si j’ai de beaux souvenirs de ma première montée des marches pour « Les chansons d’amour » (en 2007, NDLR). En fait, j’aimerais bien retourner à Cannes comme juré. J’ai l’habitude de ne pas manquer une Palme quand elle sort en salle. Celle de cette année, « Un simple accident », de Jafar Panahi, est vraiment très bien. Et j’ai trouvé « Sirat » assez extraordinaire.
Votre dernier album original, « Pas plus le jour que la nuit », remonte à six ans. Pourquoi une si longue attente ?
Je n’avais pas envie de donner l’impression de faire toujours la même chose. Or, plus on écrit, plus c’est difficile. Je me suis posé beaucoup de questions. J’avais suffisamment de chansons en juillet mais certaines ne me semblaient pas à la hauteur. Je m’y suis donc remis avec pour objectif d’enregistrer mon nouvel album début 2026 pour le sortir quelques mois plus tard. Je retrouverai Nicolas Subréchicot, déjà à l’œuvre sur mes deux derniers disques (1), mais aussi de jeunes compositeurs, dont j’apprécie le travail ou qui viennent vers moi car ils ont été marqués, me disent-ils, et c’est touchant, par « Les chansons d’amour ».
Album « Un lendemain soir de gala », de Vincent Dedienne (Little Big Music/Sony Music) avec un CD et le DVD du spectacle « Un soir de gala ». Concerts mardi 16 et mercredi 17 décembre à la salle Nougaro, Toulouse. Dernières places. Tarif: 39,80 euros.
Film « La femme la plus riche du monde », de Thierry Klifa, au cinéma mercredi 29 octobre.
(1) Nous confirmons : duo très touchant entre Vincent Dedienne et Alex Beaupain dans l’émission « Comme un samedi » avec les chansons « Soldat inconnu » (de Beaupain) et « Vieille âme » (d’Adrien Gallo), plus une reprise d' »Avant la haine », un des classiques de Beaupain, interprété à l’origine avec Camélia Jordana.
(2) On lui doit notamment la musique de la sublime chanson « Je suis un souvenir », en 2013.

