Et si le cinéma, un jour, décidait de s’écrire lui-même ? Non pas sous la forme d’un scénario, ni d’un essai savant, mais comme un rêve éveillé, une déclaration d’amour éperdue à la fiction, à ses héros, à sa magie. Avat’aime, le roman cinématographique de Laurent Bonetti, publié aux éditions LettMotif, s’avance comme un ovni littéraire. Drôle, émouvant, libre. Un livre inclassable, mais profondément habité par le septième art.

Laurent Bonetti
Un chauffeur de bus en apesanteur cinéphile
Laurent Bonetti n’a rien d’un héros hollywoodien. Chauffeur de bus sur la ligne 59 à Paris, il écrit entre deux trajets, entre deux mondes : celui des voyageurs du quotidien et celui, infini, des images qui le hantent. Dès les premières pages, on comprend que son récit sera une traversée. Une traversée de soi, de la ville, du cinéma tout entier. La préface lumineuse d’Antoine Sire (auteur et amoureux du cinéma) donne le ton : “Sur la ligne 59 de Laurent, personne ne valide son ticket, mais tout le monde repart avec un forfait pour l’imaginaire.”
C’est exactement cela : un ticket composté pour un voyage halluciné, poétique, d’une sincérité bouleversante. Bonetti ne filme pas ; il écrit ce que le cinéma lui fait. Il ne raconte pas des films ; il raconte comment ils l’ont sauvé.
Quand Amélie Poulain rencontre Terminator
Le roman débute comme une autobiographie modeste, presque banale, avant de basculer dans le fantastique. Une mystérieuse Fondation Amélie P. – oui, celle de Jean-Pierre Jeunet – contacte le narrateur pour lui proposer de devenir un “avat’aime”. Un messager chargé d’alléger le mal-être des icônes du cinéma : Antoine Doinel, King Kong, Rambo, ou encore Jessica Rabbit. Le héros part à leur rencontre, à mi-chemin entre rêve et délire, dans un univers où le Grand Rex devient un temple mythologique et où les personnages de fiction cherchent à exister encore un peu à travers nous.
Chaque chapitre est un hommage vibrant au cinéma, du Parrain de Coppola à E.T., de Pasolini à Varda. Mais au-delà des clins d’œil, c’est l’émotion brute qui domine. Bonetti écrit avec la ferveur d’un spectateur amoureux, avec le lyrisme d’un poète des salles obscures.
Un roman qui respire le cinéma
Il faut le dire : Avat’aime n’est pas un roman comme les autres. Il emprunte au scénario sa structure, au monologue intérieur sa liberté, à la chronique de cinéphile son enthousiasme contagieux. Bonetti ne craint ni l’excès ni la naïveté ; il s’abandonne. On pense parfois à Fellini, parfois à Terry Gilliam, parfois à Truffaut, mais c’est toujours la voix d’un amoureux blessé, réconcilié par le cinéma, qu’on entend.
Le texte foisonne de références, d’images, de correspondances. On y croise Michael Lonsdale, Audrey Tautou, Thierry Frémaux, mais aussi le fantôme d’une France qui continue à croire que l’art peut consoler. Rarement un livre aura si bien capté ce que c’est qu’aimer le cinéma : non pas le consommer, mais le laisser vivre en soi.
Entre fiction, manifeste et autofiction
Ce qui impressionne chez Bonetti, c’est la sincérité. Il raconte sans fard ses doutes, ses échecs, ses vingt années de tentatives pour approcher les géants du septième art. Et soudain, par la grâce de l’imaginaire, il franchit la barrière. Il entre dans le cinéma. Ce que le réel lui refusait, la fiction le lui offre : un espace de reconnaissance, de liberté, de jeu.
Un livre à offrir à tous les amoureux du septième art
En publiant ce texte hors norme dans sa collection Roman cinématographique, les éditions LettMotif confirment leur rôle unique dans la défense d’une littérature issue du cinéma, mais qui ne s’y soumet pas. Avat’aime se lit comme un road movie intérieur, une lettre d’amour adressée à toutes les images qui nous ont faits.
Un livre rare, généreux, sincère, où le lecteur, qu’il soit critique, cinéphile ou simple rêveur, se reconnaîtra. Parce que, comme le dit si bien l’un des personnages : « Le cinéma n’est pas dans la salle ; il est partout où l’on croit encore à la lumière. »
Avat’aime, de Laurent Bonetti
Roman cinématographique – Éditions LettMotif
Éditions LettMotif
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