Critique. Enregistrement CD. John Dowland et Henry Purcell : Songs of Passion. Thomas Dunford ; Lea Dessandre. Ensemble Jupiter. 2 CD Erato. Durées : 42’17 et 51’5. Enregistrement de 2025.
Le charme infini de la mélancolie élisabéthaine.
Thomas Dunford né dans une famille de délicats musiciens baroques nous ouvre son jardin des souvenirs en compagnie de l’ensemble Jupiter et de Lea Dessandre. Le résultat est charmant et nous permet en deux CD de nous immerger dans la beauté d’une interprétation troublante de ces musiques mélancoliques née au temps d’Elisabeth première. En effet Dowland est le chantre de ce genre musical et Purcell le magnifie un siècle plus tard avec le lamento final de Didon qui est le chant même de la mélancolie de l’âme.
Le premier CD alterne des madrigaux, des morceaux de musique instrumentale et des airs de Dowland. Tout glisse, avance sans heurts. La perfection vocale et instrumentale est absolue. Le choix des airs et la mise en madrigaux de certains est un véritable ravissement. La voix de Lea Dessandre est un véritable caméléon et peut se colorer et nuancer avec art chaque mélodie. Le texte est articulé avec délicatesse et l’interprétation est à la fois très naturelle et très sophistiquée. C’est tout à fait magique. Les complices vocaux sont admirables également : Jess Dandy alto, Laurence Kilsby ténor, Huw Montague Rendall baryton. L’ensemble instrumental mené depuis le luth par Thomas Dunford est admirable de beauté sonore et d’intensité expressive. Le naturel qui se dégage de cette interprétation est paradisiaque.
Chez Purcell le coté intimiste de l’interprétation magnifie la richesse mélodique et la puissance des passions contenues dans cette belle musique. Les larges extraits de Didon et Énée qui terminent l’enregistrement sont si émouvants qu’ils nous font rêver à l’intégrale de l’opéra que ses interprètes pourraient proposer.
Si la première génération d’interprètes baroques nous a enchanté par ses audaces et une curiosité insatiable ses enfants sont des hérités doués qui avec un naturel et un chic fou vont encore plus loin dans les émotions avec une perfection instrumentale nouvelle. La très belle présentation des enregistrements en noir et blanc rajoute à la mélancolie et la prise de son magnifie l’interprétation. Ce sont de biens beaux CD enregistrés par ERATO qui vont certainement enchanter un vaste public.
Le lien pour avoir les détails précis sur les CD.
Hubert Stoecklin