Rachid Benzine publie L’homme qui lisait des livres aux éditions Julliard. Le parcours d’un libraire qui, au cœur du chaos, a choisi les mots.
Rachid Benzine @ Astrid di Crollalanza
Un jeune photographe français arpente les rues de Gaza au lendemain d’une énième attaque. Muni de son appareil, il scrute, observe la beauté et les décombres. Puis, un autre quartier, d’autres décors. Et, au milieu de ce paysage, un homme adossé au mur d’une librairie, en train de lire. Une devanture pleine de livres. De partout. Des couleurs et un fouillis qui intrigue le photographe. Aussitôt, il veut capturer l’instant. Capturer l’image de ce vieil homme inspirant. Mais celui-ci l’arrête. Une photo ce n’est pas rien. Une photo ça raconte. Et si le photographe veut saisir cette particularité, il devra écouter l’histoire du libraire, Nabil al Jaber.
Tenir debout
Nabil tend un premier livre au photographe. Sans explication, sans attente. Il lui propose de revenir le voir pour en parler. Le lendemain, c’est l’histoire intime de Nabil al Jaber qui devient la trame narrative. Et quelle histoire ! D’abord celle d’une guerre, puis d’un exil forcé vers les camps de Jéricho. On vit, on survit, on s’organise. Mais le déracinement et la violence sont là, omniprésents. Le jeune Nabil veut s’extraire de ce récit. Les mots l’y aideront. Ceux de Shakespeare et de bien d’autres. Il quittera le camp avec cette arme entre les mains. Car la vie sera difficile et cruelle. La perte des aimés et la blessure de tout un peuple.
On retrouve dans ce court texte la force et la puissance du verbe de Rachid Benzine. Les digressions sont inutiles pour raconter l’essentiel d’une vie et de ses tourments. De ces bonheurs également. Pour y parvenir, une écriture ciselée, précise et poétique. Le souci du détail se niche dans toutes les émotions et paroles du libraire afin de sculpter un portrait qui imprègne la mémoire intime mais aussi collective. Tel est le message du duo auteur-personnage, la littérature au service de la vie et de l’humanité. Un texte simplement bouleversant. Et nécessaire !
