L’Epreuve du feu un film d’Aurélien Peyre
Avec Coqueluche, un moyen métrage tourné en 2022, le réalisateur Aurélien Peyre avait ébauché un thème, la lutte des classes, qu’il va considérablement approfondir dans son premier long : L’Epreuve du feu.

Anja Verderosa (Queen) et Félix Lefebvre (Hugo) – Crédit : Move Movie
Encore une fois, le cinéaste prend l’île comme témoin et espace d’un huis clos à ciel ouvert, un lieu dont on ne s’échappe que difficilement, un univers qui les comprend tous. Il y a ceux dont les maisons trempent leurs pieds dans l’eau et ceux dont l’habitation se terre au fond des vallées. Il y a ceux qui ont des bateaux et ceux qui rêvent d’y monter dessus. C’est dans ce monde fracturé que le scénario du dernier et premier opus d’Aurélien Peyre se développe. Nous faisons rapidement connaissance avec un duo un brin improbable. Queen, majestueuse autant que fulgurante esthéticienne, arrive au bras de son copain Hugo dans cette île qui a abrité les vacances de la prime jeunesse de ce dernier. Les amis et amies sont toujours là. En fait, ils ne le reconnaissent pas de suite car Hugo, un « petit gros » dans leur mémoire, est devenu un beau garçon, tous pectoraux dehors. Toujours aussi timide et réservé, certes. Timide, Queen ne l’est vraiment pas. Elle est même très ouverte et d’une franchise qui frôle parfois la naïveté dans un tel milieu. Robe moulante, ongles démesurés de toutes les couleurs, elle est regardée par la troupe un peu comme un corps étranger. Alors qu’Hugo essaie de s’enlever l’habit de victime que son ancien physique et son tempérament lui ont toujours collé sur le dos, une manipulation d’une bêtise crasse va se tramer à bord d’un catamaran.
La violence et l’inconséquence des rapports sociaux chez les grands ados font florès dans le cinéma. Jalousie, lutte de classes, fracture sociale sont des thèmes aussi récurrents que d’une permanente actualité. Le film d’Aurélien Peyre est une véritable expérience médicale : comment éliminer un virus, quitte à faire du dégât autour. Aussi consternant qu’effrayant !
Ce film porte à l’écran toute une poignée de jeunes acteurs de grand talent, particulièrement Nolan Masraf (Kamil, l’Arabe de service). Anja Verderosa (Queen) a été sélectionnée à la suite d’un casting sauvage via les réseaux sociaux. Elle n’avait jamais fait de cinéma auparavant et démontre ici une sincérité de ton tout à fait encourageante. Le héros, Hugo, est beaucoup plus connu. Découvert par François Ozon dans Eté 85 en 2020, revu dans La Passagère d’Héloïse Pelloquet en 2022, Félix Lefebvre coche – presque – toutes les cases pour incarner ce jeune homme mal dans sa peau et en recherche de signe extérieur de virilité. Un portrait difficile, il faut en convenir, abordant au passage le thème de la honte, un portrait complexe que ce jeune comédien ne parvient pas à tracer totalement. L’épreuve du feu, avez-vous dit ?
Entre mépris de classe et stéréotypes de genre, l’éternité de la comédie humaine.