Last Stop : Yuma County un film de Francis Galluppi
Un diner, huis clos d’une irrésistible prise d’otages pétrie d’humour noir et de rires jaunes. Un premier long virtuose qui en dit long, encore une fois, sur l’Amérique contemporaine. A voir !

Jocelin Donahue (Charlotte) et Jim Cummings (Le Vendeur de couteaux) – Crédit : The Jokers Films
Sous l’écrasante chaleur de l’Arizona, au beau milieu de nulle part, sur une route perdue, un diner vous attend, tout à la fois restaurant, motel et station essence. C’est là que s’arrête, d’urgence, un vendeur de couteaux, en panne sèche. Problème, les citernes sont vides et Charlotte, la serveuse, lui annonce qu’elle est en attente du ravitaillement. Elle lui sert un café. Des nouvelles sont parvenues par radio indiquant qu’un holdup a eu lieu non loin de là. Deux braqueurs se sont emparés de 700 000 dollars et se sont enfuis à bord d’une voiture verte. Le paisible diner accueille alors deux pieds nickelés aussi différents l‘un que l’autre. Autant l’un semble être la tête de cette équipée, autant l’autre, plutôt bas du plafond, parait prédisposé à toutes les gaffes possibles. Les regards que jettent le vendeur de couteaux à la voiture et le conciliabule qui s’en suit avec Charlotte sont repérés par les braqueurs. Découverts, ils sortent leurs armes et intiment aux deux malheureux de ne rien dire jusqu’à l’arrivée de la citerne car, bien sûr, eux aussi sont à sec. Cette dernière tardant à arriver, le diner se remplit petit à petit. Ainsi débarquent un couple entré dans l’âge, un autre couple beaucoup plus jeune mais un peu allumé, un chef indien, etc. Tout est en apparence calme jusqu’à ce qu’un pistolet sorte et que le premier coup de feu explose. Ce sera une vraie fusillade car, en fait, tous ces braves gens sont… redoutablement armés.
Pour son premier opus, le réalisateur rend hommage à Tarantino, aux frères Coen, à Wes Craven aussi. On est toujours l’enfant de quelqu’un. Comment le lui reprocher, d’autant que son film est diaboliquement monté, suscitant l’angoisse, le suspense et un humour totalement fracassant. La reconstitution des années 70 est exemplaire. Evitant le star system, Francis Galluppi s’est entouré d’acteurs de grands talents, ayant ce que l’on appelle gentiment des « gueules ». Certes Jim Cummings en vendeur de couteaux format gendre idéal se transformant en tueur en série est à hurler de rire, de même que Jocelin Donahue en Charlotte tétanisée par la situation, mais il faudrait tous les citer, y compris le chef décorateur qui a fait de ce diner un huis clos asphyxiant, image même d’une certaine Amérique surarmée et, quasiment personnage essentiel de ce film à voir absolument.