En choisissant des compositeurs de la Mitteleuropa si variée, Joël Suhubiette construit son nouveau programme comme un patchwork de paix et de beauté. L’âme Slave va du rire aux larmes, du plus savant au populaire avec noblesse et énergie. Lors de ce concert le chœur de chambre les éléments chante donc avec clarté en 5 langues. Ce travail sur le texte est agréable car les sonorités sont à la fois proches et variées et le sens des mélodies est profondément porté par les chanteurs. L’engagement de chacun est total, tant avec le texte que la voix. Les qualités du chœur de chambre sont particulièrement mises en valeur par ce programme. Précision rythmique, justesse, lignes mélodiques ciselées et agréables nuances. Les couleurs vocales épousent celles des mots et le sens en devient limpide. La poésie de ces œuvres, surtout celles a cappella, permettent de savourer de belles émotions. L’allemand, le tchèque, le russe, le slovaque et le hongrois sonnent fraternellement. Quand on sait les conflits armés qui ont encore récemment embrasé ces régions on mesure combien, en fait, ces peuples sont proches en entendant la musicalité des belles langues et la richesse de cette musique si savante et populaire à la fois. Joël Suhubiette a parfaitement construit son programme, l’ouvrant avec un clin d’œil par Schubert avec Corine Durous au piano dans la mélodie Hongroise en si mineur. La tension perceptible rend sa lecture un peu abrupte. Celle du chœur dans les extraits des Zigeunerlieder de Brahms suggère un besoin de temps pour parfaitement s’équilibrer.
Les Eléments ont l’âme Slave
Dans les trois cycles de Dvorak, le sublime s’invite. Les trois chants slaves pour chœur d’hommes a capella sont un sommet d’émotion et de tenue vocale. L’engagement des chanteurs permet au chef d’obtenir de superbes couleurs et des nuances extrêmes. Ensuite, tout le chœur a cappella offrira un élargissement de beauté sonore avec un superbe équilibre entre les pupitres. Les quatre chansons populaires moraves op.20 avec Corine Durous termineront la première partie avec éclat.
En deuxième partie de programme, c’est au pupitre de femmes de briller avec deux chœurs de Tchaïkovski et Rachmaninov dans le plus pur romantisme russe, la lumière de l’aube et du crépuscule y apporte cette belle mélancolie issue de la nature. En total contraste les quatre chansons paysannes de Stravinsky a capella sont pleines de vie et humour. Les chants slovaques de Bartók permettent de retrouver tous les pupitres et le piano dans un élargissement de couleurs somptueuses. Puis, Corine Durous avec une superbe lecture des 3 chants populaires hongrois pour piano fait percevoir sa passion pour le chant et la déclamation. Elle narre des histoires pittoresques à la manière de récitatifs et sait faire chanter son piano….
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Hubert Stoecklin