Avec Ben Affleck, Chris Cooper, Tommy Lee Jones, Kevin Costner, Maria Bello, Craig T. Nelson, Eamon Walker.
Boby Walker mène une vie de rêve. Il est directeur commercial d’une multinationale à Boston (eh oui, c’est Ben Affleck, donc c’est Boston), gagne 160.000$ par an, roule en porsche, habite une grande maison avec une famille de rêve, et travaille son swing de golf tous les matins avant d’aller au boulot. Mais un matin, sa boîte dégraisse et il se retrouve au chômage. Se succèdent le cabinet de reclassement personnalisé, les bilans de compétences, et les coups de fil infructueux. Sa belle vie part en vrille, et s’ensuit une remise en question. Bientôt, la multinationale licencie aussi ses collègues Woodward et Mc Clary. Les trois hommes vont chuter lourdement. Chacun à sa manière.
Malgré cet univers fait de stock options, jets privés, et maisons de rêves, ce qui ressort de ce film, c’est avant tout son caractère humain, où comment des hommes partis de rien et à qui tout a réussi, doivent tout recommencer depuis la base. Bien sûr, les trois parcours sont différents. Walker est le plus jeune, commercial de talent, et s’accroche comme un fou à ses privilèges : voiture bling bling, carte de membre du club de golf, salaire. Les déceptions et les échecs vont le pousser à reconsidérer ses priorités et ravaler sa fierté.
Je devine les réserves qui viennent naturellement chez le lecteur de ces lignes : l’appréhension d’une belle morale faite de bons sentiments, ressortant sous formes de beaux ralentis des parents jouant avec les gamins dans l’herbe verte du parc municipal, histoire de marteler que les valeurs familiales sont la base de toute vie bien réussie. Eh bien non, le réalisateur John Wells se montre plus fin que cela : chacun des trois hommes licenciés apporte un éclairage différent sur le sort des deux autres. L’isolement, le divorce, l’âge trop avancé, la peur du changement, la rétrogradation sociale, s’abattent sur eux, ils sont les trois facettes de l’homme moderne qui perd son emploi, déchu de sa virilité, de son rayonnement, sa raison de vivre.
En aucun cas misérabiliste, « The company men » se veut avant tout optimiste. Son casting trois étoiles est juste impeccable : Ben Affleck campe parfaitement le jeune connard trop fier pour demander de l’aide à ceux qu’il a toujours considérés comme des ploucs, mais trop sympathique pour ne pas susciter le dégoût. Chris Cooperincarne le responsable effrayé par la perte de son boulot, désespéré et au bout du rouleau, dans un foyer sans âme. Tandis que Tommy Lee Jones, pour une fois un modèle de sobriété (ou enfin, bien dirigé), est idéal en dirigeant paternaliste dépassé par le plan social, mais toujours increvable. Kevin Costner, méconnaissable en chef de chantier usé en gants et chemise canadienne, semble être né pour jouer les travailleurs se levant tôt, avec sa grosse tête parsemée de quelques rares cheveux.
Des personnages intéressants, un scénario misant sur la quotidienneté d’hommes frappés par la perte de leur emploi, un casting en béton armé, « The company men » est la première bonne surprise de ce printemps cinéma.
Thomas Berthelon : http://thomasberthelon.com