El Reino, un film de Rodrigo Sorogoyen
Sur le thème de la corruption dans l’univers de la politique, ce film, qui vient de remporter pas moins de 7 Goyas (équivalent des Césars en Espagne) est une claque monumentale. A voir absolument !
La première scène tient de l’illusion. Les potentats locaux d’un parti politique s’empiffrent dans un excellent restaurant. Rires gras et sous-entendus sont aux menus. Illusion car la fête est en train de se terminer. Un traître parmi eux vient de vendre la mèche, laquelle conduit la police au cœur d’un système visant à détourner des fonds européens, des subventions publiques, un système qui ne dédaigne pas la prévarication. Un complet en somme.
Autour de ladite table, mais il ne le sait pas encore, Manuel Lopez-Vidal, le dauphin du responsable régional de cette phalange politique est, en sous-main, le bouc-émissaire du drame. Dès qu’il va en prendre conscience, il va se déchaîner pour sauver sa peau. C’est le début d’un thriller qui va vous tenir en apnée pendant plus de deux heures. Quand les amitiés se délitent, que les trahisons pleuvent en tous sens, que la parole donnée n’a plus de souvenirs, que les coups deviennent de plus en plus dangereux, l’animal politique qu’est Manuel devient à son tour un prédateur aussi intelligent que rusé et redoutable. Je vous laisse savourer une conversation surréaliste sur un balcon, ou encore une course-poursuite en voiture en pleine nuit tous feux éteints, ou encore un véritable casse dantesque dans une somptueuse villa au nez et à la barbe des occupants. Entre engueulades monstres et chuchotements à l’oreille, la dynamique des conversations, sans parler d’un vocabulaire parfois « imagé », est à géométrie explosive. Tout cela pour nous mettre en présence de politiciens véreux, sans âme aucune et encore moins sans aucune notion du service public et de l’intérêt général. Sans citer de noms ou de partis, le cinéaste s’inspire fortement des scandales en la matière qui secouent l’Espagne depuis des dizaines d’années. Et quand on dit l’Espagne…
Monté sur un rythme à peine soutenable, porté par Antonio de la Torre, Manuel magistral d’animalité, de film, qui par certains aspects, pourrait tenir du docu-fiction, s’achève sur un entretien télévisé en direct qui en dit long aussi sur l’influence du 4ème pouvoir, celui des médias.
Un film choc, une véritable claque qui dresse un panorama bien peu reluisant de l’univers qui nous gouverne. Est-ce une véritable révélation ? La réponse est dans la question.
LE film à l’affiche du moment.
El Reino – Réalisateur : Rodrigo Sorogoyen – Avec : Antonio de la Torre, Monica Lopez,…
Antonio de la Torre – Un immense talent, la légèreté en plus
Né en Andalousie alors que Mai 68 se déchaîne en France, Antonio, qui se rêve comédien depuis toujours, signe son premier contrat pour une série tv, il a 25 ans, en 1993. Que de chemin parcouru depuis. Aujourd’hui, avec un corpus de plus de 30 films, multi-récompensé, il est l’acteur incontournable de la Péninsule ibérique. Visitant tous les genres, du dramatique au comique, avec une égale virtuosité, il éblouit par sa présence physique, son énergie. Cet ancien étudiant en journalisme n’a pas fini de nous séduire.