Le Caire Confidentiel, un film de Tarik Saleh
Depuis le célèbre plateau de Gizeh, voisin du Caire, où se dressent les célèbres pyramides, les mânes de Khéops, Khephren et Mykérinos peuvent dormir tranquille, rien n’a changé sous le soleil d’Egypte depuis plus de 4000 ans ! Et à voir le dernier opus du réalisateur suédois Tarik Saleh, l’on pourrait même penser que cela a empiré.
Pour écrire son scénario, ce dernier s’est inspiré d’un fait divers sanglant assez similaire qui avait vu la mort d’une chanteuse libanaise, Suzanne Tamim, en 2008, assassinée sur ordre de son amant, un richissime promoteur égyptien, très proche du pouvoir. Reconnu coupable, condamné à mort, il écope en définitive de 15 ans de réclusion dans une prison-hôtel… Le film sous rubrique n’est vraiment pas loin de cette histoire, tragique à plus d’un sens. C’est Noredin (Fares Fares, absolument épatant) qui est chargé de l’enquête. Très vite, il est aisé de comprendre que le Commissariat dans lequel il travaille est pourri de l’intérieur, lui inclus. Clairement la corruption règne à tous les étages de la hiérarchie et le sport qui s’y pratique le plus est la collecte de ce qui s’apparente à du racket. Mais voilà, Nouredine va se passionner pour ce meurtre, d’autant, qu’a priori, il y aurait un témoin visuel qu’il va falloir sauver à tout prix. Nous sommes dans un polar bien glauque, bien poisseux, bien gluant.
Tortures et assassinats se conjuguent à foison afin de protéger l’intime de la famille régnante. Le thriller est admirablement conduit mais le personnage essentiel est impénétrable, sauvage, obscur, dangereux. Ce personnage c’est Le Caire, cette ville gigantesque ravagée par la pollution et la violence joue ici le rôle de toutes les déviances, de tous les possibles. Après avoir reçu la forte recommandation de son ambassade de déguerpir toutes affaires cessantes, Tarik Saleh a fini de tourner son film depuis le Maroc via de la vidéotransmission et une équipe technique aussi réduite que discrète restée sur place pour filmer les derniers plans. Nous sommes en 2015, le Printemps arabe (2011) qui a vu la chute de Moubarak, aujourd’hui libre comme l’air, est dans tous les esprits…
Grand Prix du festival international de Sundance, Grand prix du festival du film policier de Beaune, le dernier long de ce réalisateur est un polar de la meilleure eau en même temps qu’un portrait sans appel d’un pays qui a pourtant été le berceau d’une immense civilisation.
Robert Pénavayre
Le Caire Confidentiel
Réalisateur : Tarik Saleh – Avec : Fares Fares, Yasser Ali Maher…
Fares Fares – Le cinéma, une affaire de famille
A 14 ans, nous sommes en 1987, ce fils de l’acteur Jan Fares fuit avec toute sa famille la guerre civile qui fait rage au Liban. Direction la Suède où se trouve déjà de la parenté pour les accueillir. Très rapidement, le cinéma et le théâtre attirent ce gigantesque jeune homme de près de 2 mètres, doté d’un physique hors du commun. Après avoir joué dans plusieurs films de son frère Josef, Fares s’envole pour Hollywood en 2012. C’est le début d’une carrière internationale. Le film sous rubrique porte un coup de projecteur particulièrement lumineux et mérité sur un artiste singulier au profil taillé à la serpe.