Il fait partie de ces rares auteurs-compositeurs-interprètes dont la voix et la poésie nous prennent « à bras le cœur ». Même si l’on ne comprend pas l’italien.
Né dans une famille paysanne du Piémont, chef de gare à Cunéo pendant 25 ans, il sillonne désormais les routes européennes pour chanter sa poésie du quotidien. A chacun de ses concerts, il nous embarque dans ses montgolfières de musique pour une odyssée sur la Méditerranée de nos cœurs, où nous croisons belles italiennes, poussières de rêves,… et migrants à la recherche d’un travail. « Aucun mur ne pourra arrêter ceux qui se déplacent à pied dans le monde ». La terre et la pluie, les amours naissantes ou malheureuses, les voyages réels ou imaginaires, Gianmaria Testa nous parle de bouche à oreille de toutes ces choses petites ou grandes qui font la vie, de ces petits bonheurs qui font le grand, à la manière d’un peintre impressionniste. Remontons le temps au fil de ses disques, tous indispensables. Des moments de bonheur à déguster dans l’intimité ou entre amis ; et toujours avec une bonne bouteille de bon vin italien ! Un Barolo ou un Dolcetto d’Alba du Piémont ; ou un Poggio ai Mori, un chianti classico de Marie Ferré. Car il ne faut pas oublier F. à Léo, son hommage à Léo Ferré, (italien par sa mère, qui a vécu en Toscane de 1970 à sa mort), où Gianmaria chante, en français, Les Forains, Les Poètes, Monsieur William, Avec le temps, sur ce jazz méditerranéen savoureux dont ses complices ont le secret : Roberto Cipelli, Paolo Fresu, Philippe Garcia…
Vitamia. Dédié à son fils Nicola, un voyage de « 18000 jours », -soit 50 ans d’une vie, d’où le titre-, qui le ramène toujours dans son pays natal, dans les vignes d’Alba ou dans les rues de Turin pour regarder la lune. Et écrire ses beaux textes pleins de poésie qu’il chantera avec sa voix de bluesman et son accent piémontais inimitable. On y trouve parfois des clins d’œil rock des guitares électriques de Claudio Dadone et Giancarlo Bianchetti, qui peuvent surprendre ses inconditionnels et qui pourtant ne devraient pas, tant ils sont en symbiose avec les cris du cœur de ce révolté de la tendresse.
Solo dal vivo. Enregistré en concert en 2008 à l’Auditorium de Rome, c’est la quintessence de son œuvre, saisie un jour de mai devant quelques amis et des inconnus venus comme à un rendez-vous d’amitié. Le son du bois de cerisier de la salle, voulu par l’architecte Renzo Piano, contribue à ce petit miracle de simplicité et de naturel: la poésie, la musique, un homme, une guitare, un verre de vin d’Alba.
Da Questa Parte Del Mare. Au marché de Porta Palazzo à Turin, le plus grand à ciel ouvert d’Europe où se mélangent les produits piémontais aux senteurs et des goûts venus de toute l’Afrique et de l’Asie, on rencontre toutes les nationalités, ils font la queue, garçons et filles, mais la police pour traquer les clandestins…Sur la neige qui s’évaporait, il y en avait une femme accouchée par terre ; tout autour les autres femmes ont a fait cercle et elles ont posé le bébé sur l’étal des fleurs.. Vos papiers s’il vous plaît c’est un cas d’accouchement sur le sol public municipal a dit l’agent de police… Mais personne n’a rien dit. Et la mère et l’enfant d’autres latitudes ont repris la mer de leur vie. Et la mer et l’amour ont l’amer pour partage… Comme l’écrivait Pierre de Marbeuf (1596-1645).
Altre Latitudini. Tu es le coquillage d’eau et de sel qui noie le rêve de se reposer et laisse des larmes qu’on n’essuie pas et qui vont à la mer…Ce texte de son complice Pier Mario Giovannone, est un des rares que n’a pas écrit Gianmaria Testa, mais il lui correspond si bien, lui qui aime tant la mer et les voyages, le coquillage qui revient au soleil, à la vague, au large et sur d’autres plages : chacun peut le ramasser et rêver avec lui pour un voyage personnel…
Lampo. La lune blanche. Une lune ce soir à toucher avec vos mains qui Lentement, lentement, s’approche et se déroule du ciel comme une pelote de laine ; lune dans la soirée et sur les toits de Turin Tous les chats de gouttières jusqu’au petit matin vont fêter dans la nuit claire Biancaluna qui se promène.
Montgolfières. Elles laissent d’imperceptibles traces subtiles les trajectoires des montgolfières et l’homme qui observe le ciel ne sait plus si elles sont vraiment parties où si elles ont toujours été là. Nous aussi, les yeux au ciel contre le vent, nous avons essayé de les suivre et perdu les traces de leur vol dans les nuages dans l’après-midi. Mais qui sait où tout a commencé…
Laissons partir ces montgolfières de rêve et laissons repartir Gianmaria en lui souhaitant bonne route, Kenavo (comme disaient mes ancêtres marins bretons).
Ciao Gianmaria e a presto, spero, et à bientôt, j’espère.
Elrik Fabre-Maigné
Gianmaria Testa Produzioni Fuorivia/Le Chant du Monde
photo : D. Crevena
www.gianmariatesta.com