Chaque mercredi, nous évoquons à travers une vidéo une chanson connue ou méconnue, revisitée ou immortalisée.
Nougayork par Claude Nougaro
Battons notre coulpe : les artistes français (à l’exception de Daft Punk) n’ont pas eu jusqu’à présent la part belle dans cette chronique. Que nos lecteurs les plus patriotes nous excusent. Il est vrai que porté vers le rock, la pop, le funk, la soul, le jazz ou la bossa, nous avons privilégié d’autres horizons. Nous corrigeons le tir cette semaine avec cependant une chanson extraite d’un disque essentiellement réalisé à New York et interprétée par un Claude Nougaro qui puisa grandement son inspiration du côté de l’Amérique, du Brésil, voire de l’Afrique, tout en étant singulièrement français et occitan. Voici donc une chanson profondément « internationale ».
Rappel des faits : au mitan des années 80, Nougaro est considéré comme « ringard ». Du moins aux yeux de sa maison de disque, Barclay, qui renvoie sans ménagement celui chante Bleu, Blanc, Blues, ce petit taureau à l’accent rocailleux qui a merveilleusement célébré le jazz et la java, les mélodies des bidonvilles de Rio, Toulouse, Sing Sing, le rouge et le noir, les bandonéons de Buenos Aires, les tambours des sorciers africains, Venise, on en passe… Dépassé le vieux Nouga qui du coup file vers New York. Dans son carnet d’adresses, celle notamment d’un autre « frenchie » né sur le Vieux-Port : Philippe Saisse. Inconnu du grand public, ce claviériste, compositeur et arrangeur a collaboré avec Chaka Kahn, Al Jarreau (il a composé Says sur L Is For Lover), mais aussi avec Brian Wilson, David Bowie, les Rolling Stones, Hall & Oates, de grands musiciens de jazz… Saisse va devenir le grand architecte de Nougayork composant Rythm’n flouze, Un écureuil à Central Park, Lady Liberty, Il faut tourner la page et le titre éponyme de l’album. Il signe les parties de clavier, les programmations, les arrangements de ces morceaux et convoque quelques-uns de ses « collègues » US parmi lesquels les immenses Nile Rodgers et Marcus Miller. Nougayork – texte jeté sur le papier en quelques minutes par Nougaro, musique composée en guère plus de temps par Saisse – est une bombe d’énergie, un cri primal métallique épousant la violence d’un film de Scorsese. Imparable : de l’intro annonçant une montée d’adrénaline au solo de guitare final (Nick Moroch) en passant par les scintillements synthétiques de Saisse et les coulées brûlantes des cuivres. Nougaro crie sa rage, son élan vital, son besoin d’en découdre. Sortis en septembre 1987, le single et l’album obtiendront un colossal succès commercial.
Voici une version live du titre au Zénith de Paris. Pas mal, non ?