« Elle l’adore », un film de Jeanne Herry
Pour son premier long, cette jeune trentenaire réunit un casting plutôt haut de gamme. Elle signe également les dialogues et le scénario d’un film qui a la force et les travers inhérents à un premier opus dans le 7ème art. Jeanne Herry s’attache aux pas de Muriel, groupie d’un chanteur populaire, plutôt beau gosse, Vincent Lacroix. Elle l’aime d’un amour sans illusion, assiste à tous ses concerts, tapisse sa chambre d’une multitude de photos dédicacées, etc. Elle lui écrit abondamment aussi, laissant au dos des enveloppes son adresse dans l’espoir d’une réponse. Un jour, ou plutôt une nuit, c’est bien plus que cela qui va lui arriver. C’est la visite de Vincent. Il vient lui demander un service, devinant qu’elle ne lui refusera pas. En fait, au cours d’une dispute, la copine de Vincent est morte, assommée par une Victoire de la musique(?), malencontreusement tombée d’une étagère. Vincent enveloppe le cadavre dans un tapis, le scotche soigneusement, le met dans son coffre de voiture, écrit une lettre à sa sœur qui vit en Suisse et gère une usine d’incinération… Muriel, ne sachant ce que contient le coffre ni la lettre est chargée de faire le déplacement. Mais les choses ne vont pas se passer aussi simplement. Bien monté, bien argumenté, admirablement dirigé et interprété, ce film se laisse voir avec infiniment de plaisir et porte le sceau d’une réalisatrice au talent indéniable. Demeure un problème. Tout au long du film deux policiers, Antoine et Coline, chargés de l’enquête, exposent leurs histoires de cœur. On se dit qu’on s’en fiche éperdument, sauf que voilà, ils sont la pirouette finale ! Un peu tiré par les cheveux mais malin tout de même. Alors que Laurent Lafitte (Vincent) use et abuse avec un égoïsme souverain des faiblesses de Muriel à son endroit, celle-ci, magnifique Sandrine Kiberlain, finit par devenir maîtresse de la situation en réalisant ici une superbe composition.
Robert Pénavayre