« Under the skin », un film de Jonathan Glazer
Un film de science-fiction sans effets spéciaux, c’est possible ? Oui, le réalisateur britannique nous en fournit la preuve avec son dernier et troisième opus. Drôle de film cependant qui vous saisit à froid, vous perd, vous mène là où il veut, intrigue aussi et qui vous laisse sans voix au bout d’1h36 que vous n’avez pas vue passer. Car in fine, ce film fascine, au sens premier et visuel du terme. Un seul vrai personnage interprété de manière saisissante par Scarlett Johansson. C’est une alien, une extra-terrestre qui s’est glissée dans la peau d’une belle terrienne. Belle au point qu’aucun homme ne peut lui résister. Elle les amène alors dans un espace-temps improbable dans lequel, nus comme le jour de leur naissance, ils s’abîment dans le néant et de transforment en quelque ectoplasme dont paraît se nourrir la gent d’un autre monde. Cette alien est suivie de près par un compatriote motard qui semble l’aider mais aussi la protéger et/ou la surveiller. Nous n’aurons pas de réponse pas plus sur ce sujet que sur les nombreuses autres interrogations que soulève ce scénario. En fait la magie de ce film tient autant du suspense (qui ne sera pas résolu) que du formidable travail graphique réalisé sur l’image. Elle vient aussi du long cheminement, imperceptible dans son avancée, de cette « femme » vers une véritable empathie pour le genre humain. Elle lui sera fatale. C’est aussi une profonde réflexion sur l’isolement et la solitude qui sont le lot de nombreux Hommes, et, dans ce film, les faits déclencheurs de la catastrophe individuelle. Très clairement un film « d’auteur ». Non moins clairement un objet filmique d’une incroyable puissance émotionnelle.
Robert Pénavayre