« Le tango, comme le flamenco, fait partie de Toulouse », dit Alain Lacroix. Hommage à Toulouse, hommage à Nougaro, Omar Hasan offre le Tango pour Claude en ouverture. Vie violence. Garonne mugit sur la chaussée du Bazacle. L’orage menace au loin.
Mais Omar Hasan a conservé quelques sortilèges de son Horloge : sa voix solaire, dans l’abrazo du violoncelle énergique de Marie-Françoise Mercier et de l’accordéon plaintif de Grégory Daltin, fait taire le tonnerre dès le second tango.
Heureux de donner pour la première fois son Café Tango avec l’Orchestre de chambre, en équipe avec Gilles Colliard comme naguère à quinze dans « une autre carrière qui n’était pas tout à fait ça », il déclare son amour à Buenos Aires (Mi Buenos Aires querido – Carlos Gardel), offre le dernier café, désabusé, à l’aimée qui s’éloigne (El Ultimo Café – Catullo Castillo), parie sur les chevaux comme sur les femmes, en perdant toujours (Por una cabeza – Carlos Gardel). La valse de colère Amor de mis amores réjouit la Foule. Il y a des larmes salées, des cafés de l’oubli, des cigarettes solitaires, des cœurs brisés. Et comme le voyageur de Schubert qui reviendrait vers ce premier amour bafoué, un retour improbable le front marqué [d]es neiges du temps [1] (Volver – Carlos Gardel). Quelqu’un cherche, plein d’espérances, / Le chemin que ses rêves / Ont promis à son désir… [1] (Uno – Enrique Santos Discépolo, Mariano Mores). Omar Hasan joue les sentiments autant qu’il les chante, tour à tour abattu, violent, résigné.
Mais il y a l’espoir aussi : comme l’hirondelle à laquelle il « ne ressemble pas », le voyageur a posé ses ailes à Toulouse, à la recherche du bonheur (Golondrinas – Carlos Gardel).
Le tube Granada permet au chanteur d’imposer sa voix lyrique. Belles notes tenues et projection puissante, il torée de sa doublure de veste rouge les insectes de nuit qui dansent dans le faisceau des projecteurs.
En bis, Omar Hasan récite puis danse avec ce « fou sympa » de la Balada para un loco (Horacio Ferrer, Astor Piazzolla). « On est tous un peu fous, mais certains plus que d’autres. » Enfin, tombant la veste, c’est le Tango corse, note d’humour potache pour terminer dans la légèreté une soirée donnée de corazón.
Un bémol pour vite l’oublier : une sonorisation trop forte et sans nuances qui tend à brouiller parfois voix, solistes instrumentaux et orchestre dans un certain fatras sonore.
[1] Traductions de Fabrice Hatem
Photos © C. Tessier
Festival Toulouse d’été, Jardin Raymond-VI, 8 août 2013
Une chronique de Una Furtiva Lagrima