Dans le lieu superbement rénové de l’Espace du Bazacle, dans la seconde galerie en sous-sol, si proche de la passe aux poissons, s’est tenu jusqu’au 27 mars une véritable passe aux rêves : l’exposition du photographe toulousain Jacques Mataly.
Des grandes photographies en couleurs scellent les noces, la fusion, entre le ciel et la mer. Et le mystère des voûtes de la galerie amplifie le silence et le recueillement qui saisissent le visiteur.
Cette exposition s’appelle « Ligne » et il s’agit bien de la rencontre entre les masses de la mer et du ciel s’unissant pour former une seule ligne.
Cette recherche depuis longtemps entreprise, cette fascination de l’horizon est plus que de la photographie, elle est une quête éthique de l’infini, du temps aux aguets. Dans cette attente de la lumière surgit d’un instant, de la couleur un moment donné, une contemplation, un véritable sens du sacré affleurent. Ce travail photographique est profondément pictural, on pourrait parfois penser à du Marc Rothko, mais c’est toujours du Jacques Mataly, tant est originale cette démarche sur les chemins de l’intangible, de l’éphémère absolue, vague après vague.
De nouvelles photographies s’ajoutent à cette recherche du temps suspendu qu’entreprend depuis quelque temps Jacques Mataly.
Homme de l’aube, celui du moment indécis où tout pourrait naitre ou disparaître, il part sur les falaises du monde guetter non pas le rayon vert, mais la naissance des rites magiques des épousailles entre ciel et mer. Pêcheur d’horizons, dans l’attente de la vague absolue, Jacques Mataly trace une ligne sans fin, et mer et ciel deviennent des ciels inversés où seule une ligne leur sert de point d’appui, de fuite vers eux-mêmes.
Le haut et le bas, le dehors et le dedans, se confondent à jamais.
Parfois les nuages servent de miroir et à l’un et à l’autre.
Des bleus profonds, des verts d’algues enfouies, des gris indécis, et des zébrures de rouge ou jaune comme traces du soleil enfui, sont les seuls personnages saisis en pleine méditation intérieure. Seule l’écume du moment qui n’ose plus passer semble chuchoter dans ses toiles, plus que photographies d’ailleurs.
Travail d’infini patience, de grande rigueur, d’obsessionnelle chasse à l’impossible, au risque du vertige de l’horizon et du vide, les photographies de Jacques Mataly ont tendu leur ligne où le temps a bien voulu se laisser prendre.
Gil Pressnitzer