Dernière nuit à Milan, un film d’Andrea Di Stefano
La descente aux enfers d’un policier à 24h de sa retraite nous donne ici un polar poisseux et fulgurant, haletant et ténébreux. L’un des meilleurs films à l’affiche aujourd’hui.
Milan, de nuit, vue depuis le ciel, en rase-motte, scintillante de lumières, traversée par l’éclat des phares. Un labyrinthe vivant. Focus au ixième étage d’une tour d’habitation. C’est la fête. Elle a été préparée en secret par Viviana, l’épouse de Franco, un capitaine de gendarmerie qui va rentrer, à quelques heures d’une retraite comme on dit bien méritée. Il s’appelle Franco Amore, le bien nommé car la légende dit qu’il n’a jamais tiré sur quelqu’un. Un exploit dans cette ville gangrénée par des mafias venues des quatre coins du globe. Enfin le voilà, il vient de faire son footing, trempe de sueur, en jogging. Tous ses amis l’acclament mais il n’a pas le temps de boire un premier verre qu’un coup de fil de son chef le ramène à ses devoirs. Il doit se rendre dans un tunnel autoroutier où vient d’avoir lieu, non pas un accident de voiture, mais un vrai carnage à l’arme automatique. Parmi les victimes, son ami policier Dino. C’est le début d’un twist dont j’arrête là le détail. C’est aussi le début d’un film passionnant, fortement documenté par le réalisateur Andrea Di Stefano. Avec son troisième long, le cinéaste monte singulièrement en gamme. Non seulement le scénario est hallucinant, même si cette histoire de ripoux n’est pas l’apanage de nos seuls voisins transalpins, mais la virtuosité avec laquelle il filme la descente aux enfers de ce pauvre fonctionnaire de police est d’une simplicité et d’une âpreté qui vous clouent sur votre fauteuil. Outre une BO d’une effrayante efficacité, saluons l’ingénieur du son qui a su capter/reproduire de glaçantes et angoissantes ambiances sonores. Côté comédiens, le film est porté par Pierfrancesco Favino. C’est lui ce Franco se débattant entre un certain sens de l’éthique et des dérapages en principe ultra contrôlés… Montagne de certitude, de force tranquille, il va devoir affronter le pire challenge de sa vie, car si celle-ci est clairement en jeu, il en est de même de celle de sa famille. Viviana, sa femme, c’est Linda Caridi, torrent d’énergie, de courage et de dévouement. Si l’histoire est tortueuse, elle est parfaitement explicite cependant et se calque avec une authenticité aveuglante sur la face sombre de la capitale mondiale autant de la mode que du bel canto, ici toile d’araignée tentaculaire où se trament les pires trahisons.
A voir absolument !