A croire que la structure ne voulait pas être en reste avec Orchestre, Chœur et Scène lyrique car, c’est aussi une réussite, et pour ce premier spectacle de la saison par la troupe des Ballets du Capitole, et pour son nouveau directeur Kader Belarbi.
Sous son immédiate impulsion qui prouve que le projet était mûrement réfléchi, c’est une petite révolution qui se met en place. Conférences, Carnets de danse, Lectures, liens avec la Cinémathèque, expositions, et autres pans d’activités, Kader et son équipe sont en phase avec les ambitions du Maître des lieux, Frédéric Chambert.
« En priorité, je souhaite maintenir le patrimoine, puis susciter la découverte en stimulant l’imaginaire avec des propositions ouvertes sur les différentes esthétiques, sur les collaborations avec les créateurs d’aujourd’hui et sur la diversité culturelle, enfin transmettre la passion de la danse. » Kader Bélarbi.
Avant d’oublier ! je vous engage vivement à investir dans le livret-programme de votre soirée pour profiter de l’iconographie fournie et des textes abondants qui sont TOUS, à lire !
Les trois parties de ce premier spectacle sont trois petits bijoux, chacune à leur manière, et les trois démontrant sans doute aucun, la qualité du corps de ballet, filles comme garçons. On ouvre avec Pulcinella dont la scénographie se prête fort bien à une chorégraphie bien dans l’esprit de la Commedia del arte tandis que la musique est amoureusement défendue par le chef Tugan Sokhiev. Pour suivre, Symphonie de psaumes qui n’est pas une musique de ballet au départ mais qui s’y prête tellement bien. La chorégraphie de Jiri Kylian emporte totalement l’adhésion.
J’avoue un petit faible pour Les Noces, ouvrage dédié à Diaghilev. La musique d’Igor Stravinski est magnifiée, me semble-t-il par la danse, surtout avec une telle chorégraphie de Stij Celis, responsable aussi des décors. On n’oubliera pas de citer les costumes, les lumières. Vous remercierez le compositeur d’avoir mis dix ans pour livrer la partition définitive, mais surtout pour livrer ce chef-d’œuvre d’instrumentation entre les quatre pianos, les nombreuses percussions et les quatre voix. L’adéquation musique-danse est ici, de plus, parfaite, à mon goût !
Pour le chorégraphe Stijn Celis, le rituel de ces noces paysannes russes est une occasion de critiquer la tradition du mariage arrangé où la promise, pareille à une poupée de chiffons, se laisse manipuler sans rien dire et n’a pas du tout voix au chapitre à un moment aussi crucial de sa vie. Sur la partition de Stravinski, mélange unique de rusticité truculente, d’humanité profonde et de foi religieuse, c’est à la fois à une parade nuptiale et à un combat que se livrent les mariées, toutes de blanc vêtues, et les mariés, en traditionnel costume noir, à grand renfort de déhanchements et de mouvements de bassin racoleurs, de sauts rageurs et de gestes répétitifs et saccadés, qui exploitent avec pertinence les rythmes complexes et changeants de la partition. Ce ballet expressionniste, d’une beauté austère, n’est pas sans rappeler Le Sacre du printemps ; par la partition, tonitruante, barbare et implacable, et surtout par la thématique, ces noces rituelles n’étant en somme que le sombre sacrifice de la vierge sur l’autel de la religion et des convenances sociales.
Un détail qui a son importance : les places les plus chères pour adultes sont à 50€, et la jeunesse est conviée pour la modique somme de 10€, et moins encore avec la Clef Jeunes. Difficile de faire mieux.
Michel Grialou
Théâtre du Capitole
Réservation