La Terre des hommes, un film de Naël Marandin
Après Au nom de la terre, Petit paysan et plus récemment La Nuée, voici que le monde rural s’affiche à nouveau sur grand écran, cette fois dans un thriller politico-sociétal qui en dit long sur la place de la femme dans un milieu d’un machisme hallucinant.
Constance (Diane Rouxel) souhaite reprendre l’élevage bovin paternel dans cette Bourgogne du 21è siècle. Avec l’aide de son père Bertrand (Olivier Gourmet) et de son fiancé Bruno (Finnegan Oldfield), Constance a comme première ambition de sauver l’exploitation de la faillite. Son rêve se conjugue autour de filière courte, d’éthique et de qualité. Mais pour cela il faut de l’argent. Le monde rural a depuis longtemps accès à une multitude d’aides nationales et européennes. Elle décide de monter un dossier parfaitement étayé et de le présenter à son ami Sylvain, puissant éleveur mais également redoutable responsable syndicaliste de cet univers paysan. Il n’est pas interdit de penser à des organismes tels que la FNSEA ou la SAFER…
Mal lui en prend car Sylvain souhaite monnayer son appui par des faveurs très précises. Prise de sidération, Constance se laisse violer, ne sachant comment réagir devant un homme qui tient son avenir entre ses mains. Bien sûr, Sylvain prend goût à la chose et revient à la charge alors que Constance va se marier. N’y tenant plus, la jeune femme porte plainte. Autre épreuve en fait devant un policier faisant tout pour ne pas prendre sa déposition. Mais la Bourguignonne a du caractère et décide de se porter partie civile. Aïe, ce n’est pas le moment pour Sylvain qui se présente pour un nouveau mandat de président. Une négociation commence.
C’est sous un éclairage âpre, rugueux et finalement immoral, que se déroule cette fiction qui, avouons-le, donne de l’univers paysan une image catastrophique. Les différentes scènes de marchés aux bestiaux sont un véritable paradigme du mâle dominant. Creusant le sillon de la femme dans ce monde masculin, Naël Marandin, pour son second long-métrage, aborde avec subtilité le thème du consentement sexuel face au pouvoir. A ce titre La Terre des hommes reste ambigu et nous laisse perplexe et en plein questionnement. Cela n’empêche en rien ce film d’être formidablement attachant, d’autant qu’il est porté par deux comédiens virtuoses dans leur incarnation : Diane Rouxel, sorte d’Iphigénie pâle mais volontaire portée par ses ambitions face à un Jalil Lespert (Sylvain) toujours aussi juste et inquiétant. Mais le message est clair, la nouvelle génération paysanne, si elle arrive à s’imposer face aux caciques (et magouilles) du passé, nous promet un avenir rural plus solidaire et enthousiasmant. Nous le savons tous, il en va de notre survie !
Diane Rouxel – Prix Romy Schneider
Dès son plus jeune âge, Diane apparaît dans les petits films familiaux de ses frères, affirmant derechef son envie de devenir comédienne. C’est en suivant une amie pour un casting à Paris que Diane Rouxel commence à passer des essais. Il ne faudra pas attendre longtemps pour que son talent soit reconnu. Ce sera devant la caméra de l’Américain Larry Clark (The Smell of Us) en 2015. Elle a alors 22 ans. Prix Romy Schneider en 2019, Diane Rouxel s’impose dans des portraits féminins particulièrement exposés et difficiles. Preuve de son talent, non ?