Ce sont deux voix en fusion, deux voix au-delà des corps, deux voix de l’âme.
Fermez les yeux au premier duetto « Cara e amabile belta » (Orfeo, Sartorio), vous ne savez plus qui est qui, il n’y a plus d’homme, il n’y a plus de femme, seules la pureté et l’esthétique du mélange intime des timbres.
Beauté et émotion des lamenti, humour des duos, alchimie des deux partenaires qui jouent subtilement l’un avec l’autre, avec la salle, avec les musiciens. Les pièces judicieusement enchaînées déroulent une histoire tour à tour tragique, drôle, amoureuse, légère, tourmentée. Tourbillon des passions.
Philippe Jaroussky, extraordinaire Sesto (en culottes courtes) du Giulio Cesare in Egitto de Salzburg le mois dernier, est aérien, magique, presque irréel, tandis que Marie-Nicole Lemieux, crinière et robe de feu, est solaire, ronde, charnelle. L’ensemble Artaserse est en parfaite symbiose, les musiciens pleurent ou rient, sont virtuoses à leur tour – magnifique « La monella romanesca » (Cavalli) interprétée par le premier violon Alessandro Tampieri. Tous ont l’humilité des grands.
Applaudissements nourris mais sans ovation d’une Halle aux Grains sous le charme – les manifestations bruyantes ne sont pas du monde de la poésie.
Les Grands Interprètes, Halle aux Grains, Toulouse, 11 juin 2012
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