Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
La Ballade de Narayama de Shohei Imamura
A la fin du XIXème siècle, dans un petit village isolé et pauvre situé dans les montagnes japonaises, la coutume ancestrale de « l’ubusate » exige que les personnes ayant atteint soixante-dix ans se rendent au sommet du mont Narayama afin d’y mourir. C’est le cas d’Orin qui accomplira bientôt le périple, accompagnée par son fils… Palme d’or à Cannes en 1983, La Ballade de Narayama de Shohei Imamura (il obtiendra une seconde Palme avec L’Anguille en 1997, entrant ainsi dans la confrérie des doubles lauréats avec Francis Ford Coppola, Emir Kusturica, Ken Loach ou les frères Dardenne) est la seconde version, après celle de Keisuke Kinoshita, en 1958, d’une nouvelle de l’écrivain Shichiro Fukazawa.
Dès les premières scènes, le spectateur est plongé au cœur d’une communauté primitive, brutale, misérable, essentiellement préoccupée par la survie, la nourriture et le sexe. Si la beauté de la nature et des paysages offre un contrepoint à la violence et au sordide de certaines situations (on se débarrasse de nourrissons en les jetant dans des rizières), le réalisme et le naturalisme du film peuvent dérouter.
Vivre et laisser mourir
Imamura met en scène les mœurs de ses personnages sans les juger, avec un œil d’anthropologue, et leur façon de vivre (et de mourir) semble se justifier par le poids des traditions, l’isolement et une existence autarcique. Paradoxalement, après nombre de séquences triviales et scabreuses, le pèlerinage d’Orin sur les épaules de son fils aîné (Ken Ogata, qui interprétera magistralement Mishima, deux ans plus tard, devant la caméra de Paul Schrader) prend une dimension presque « humaniste ». C’est en tout cas la part la plus lumineuse d’une œuvre dérangeante où la cruauté du rite révèle cependant chez le fils l’expression d’un sentiment.
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