Sans doute las de tourner en rond sur les plateformes, Steven Soderbergh revient au cinéma grand public…sur grand écran, avec « The Insider », film à suspense en quasi vase-clos mettant aux prises des espions anglais d’un même service.
Il a multiplié les films expérimentaux (comme « Présence », sorti récemment) et s’est amusé, entre séries et longs-métrages, avec les possibilités – surtout financières – des plateformes. Mais à quand remonte la dernière performance au box-office de Steven Soderbergh ? Côté USA, on citera « Magic Mike », en 2012. Et plus mondialement, « Contagion », l’année précédente. Autant dire que le réalisateur américain joue gros, sur le plan commercial, avec « The Insider », présenté comme un thriller alors qu’il s’agit plutôt d’un film d’espionnage à l’ancienne, qu’on pourrait rapprocher des classiques paranoïaques des années 70 comme « Les derniers jours du Condor », de Sydney Pollack, ou « A cause d’un assassinat », d’Alan J Pakula.

Michael Fassbender, très classe dans « The Insider ». Photo Focus Features
L’intrigue, imaginée par David Koepp, complice de long date de Steven Soderbergh, se déroule à Londres, entre quartiers chics et bureaux high-tech. Un chef de service du genre glacial (Michael Fassbender) et quelques collègues, dont sa femme (Cate Blanchett) doivent chercher la taupe qui aurait vendu aux Russes un programme informatique pouvant faciliter un attentat nucléaire (on simplifie). La vérité doit sortir de dialogues à fleuret moucheté, notamment au cours de deux dîners organisés par le couple principal. Tout n’est que tromperies, manigances et trahisons dans ce monde de « putains de menteurs professionnels » (dixit une des convives). On assiste à ce match des ego avec une certaine jubilation, bien que l’artificialité du dispositif soit parfois un peu trop voyant. Car cet « Insider » bien vicieux et finalement assez intellectuel, privé de courses-poursuites et d’explosions (sauf une « quelque part sur une route de Pologne ») n’a rien à voir avec un épisode de « Mission : Impossible » ou de « James Bond », même avec Pierce Brosnan au générique en vieux briscard du Renseignement. Le comédien, d’abord méconnaissable, porte bien ses cheveux blancs et ses rides. Et nous amène à une réflexion sur l’inégalité de perception du vieillissement chez les comédiens célèbres. A aucun instant, Brosnan ne paraît avoir un autre âge que le sien, à savoir 71 ans. A l’inverse, le visage lisse de Cate Blanchett, 55 ans, avec ses pommettes relevées et ses lèvres botoxées, finit par devenir gênant, ne cultivant, contrairement au film, aucun mystère… sur les tristes effets de la chirurgie esthétique.
« The Insider », de Steven Soderbergh, actuellement au cinéma.